La société civile fait campagne pour plus de responsabilité des entreprises  !

Les entreprises ont longtemps été libres de décider comment et où elles devaient assumer la responsabilité des impacts négatifs de leurs activités sur les droits humains.  

C’est un fait établi que les entreprises, et en particulier celles dont les chaînes de valeur sont longues, complexes et s’étendent au-delà des frontières, opèrent dans un vide juridique avec peu voire aucune responsabilité. Ces dernières esquivent souvent leur responsabilité dans leurs chaînes de valeur, par exemple lorsqu’elles fournissent des produits fabriqués dans des conditions d’exploitation des travailleur.se.s (à l’image de l’enquête menée par EuroMed Droits à Huelva en Espagne). Ou dans l’utilisation finale de leurs produits, comme l’utilisation par Israël de pelleteuses JCB pour démolir des maisons palestiniennes.

Les Principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits humains ont constitué la première véritable rupture avec l’idée que l’impact des entreprises sur les droits humains était largement régi par des principes volontaires. Ils établissent que toutes les entreprises, grandes et petites, ont la responsabilité d’évaluer et d’atténuer en permanence l’impact de leurs activités sur les droits humains. Toutefois, les entreprises n’ont pas pleinement mis en œuvre les principes des Nations unies, car ils ne sont pas juridiquement contraignants.  

S’assurer que les entreprises ne violent pas les droits humains à l’étranger fait partie des obligations extraterritoriales de chaque État en matière de droits humains. C’est pourquoi la société civile demande à l’UE et à ses États membres de mettre en place des cadres juridiques solides permettant de garantir la responsabilité des entreprises. Dans quelques pays européens, dont la France et l’Allemagne, des lois nationales comportant certaines exigences en matière de diligence raisonnable sont en place, et dans de nombreux pays, comme en Belgique, des mouvements demandent la mise en œuvre de lois. Ces lois pourraient, si elles ne sont pas compromises, améliorer l’accès à la justice pour les victimes de violations des droits humains liées aux activités commerciales des entreprises européennes.  

Récemment, la Commission européenne a publié sa proposition de Directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité. Cependant, après un lobbying intense, la proposition de directive a été édulcorée. Sa portée est actuellement très limitée et, par conséquent, elle n’est pas alignée sur les normes des Nations unies. Elle doit être renforcée pour avoir un impact réel.  

Les lois sur la diligence raisonnable obligatoire, au niveau européen ou national, ne remplacent pas les luttes visant à faire adhérer les États aux traités (les conventions de l’OIT, par exemple) et ne constituent pas non plus la panacée au problème de la responsabilité des entreprises. Mais elles constituent des étapes progressives vers la responsabilisation des entreprises, jusqu’à ce que des cadres universels et plus complets soient mis en place, tels qu’un traité contraignant sur les entreprises et les droits humains