Le confinement actuel aggrave les violences conjugales : alors que les organisations de défense des droits des femmes avaient tiré la sonnette d’alarme, le Fonds des Nations Unies pour la population estime que pour chaque période de trois mois durant laquelle le confinement se poursuit, 15 millions de cas de violences sexistes supplémentaires pourraient survenir. En plus de l’incertitude économique et de la promiscuité de certains cadres de vie, le contexte anxiogène créé par le COVID-19 peut mener à une hausse des abus venant de partenaires déjà violents. Dans ces conditions particulières, les opportunités permettant auparavant aux femmes de contacter les numéros d’urgence sont significativement réduites.
Ainsi, les gouvernements et les organisations de la région euro-méditerranéenne ont dû se tourner vers les nouvelles technologies pour trouver des solutions. En Turquie, le Système de Soutien aux Femmes (KADES) a mis en place une application téléphonique alors qu’en Espagne, les femmes victimes de violence peuvent discuter sur WhatsApp en utilisant un numéro national d’urgence. L’appel est géolocalisé pour permettre une intervention immédiate. Des solutions de terrain sont également mises en avant. En Espagne par exemple, les femmes peuvent utiliser le code « Mascarilla 19 » dans les pharmacies pour signaler un danger.
La crise actuelle a forcé les gouvernements à prendre rapidement des décisions depuis longtemps réclamées par les organisations de droits des femmes. La Tunisie par exemple a récemment ouvert un service téléphonique d’assistance psychologique (« 1809 ») accessible 24h/24 et 7j/7. Les gouvernements font également appel à la collaboration du secteur privé. Des centres de conseil temporaires sont désormais présents dans les supermarchés français. En Espagne à nouveau, une loi autorise désormais la transformation des résidences touristiques en refuges d’urgence. Des mesures similaires ont été prises en Tunisie où dix unités d’habitation accueillent des femmes victimes de violence.
Le rôle des organisations de défense des droits des femmes dans la prévention et la protection des victimes est essentielle en cette période. Une réalité reconnue par certains gouvernements qui ont augmenté leurs subventions à cet effet.
Alors que certaines mesures sont – lentement – mises en place dans certains pays, nous ne pouvons que regretter que d’autres n’aient fait aucun effort à cet égard. Au Maroc par exemple, les organisations de la société civile regrettent la faiblesse inexplicable de la réponse de l’Etat sur ce sujet. En Egypte, le Parlement semble plus inquiet de l’usage que font les femmes des plateformes en ligne que des risques de hausse des violences.
A l’avenir, les gouvernements de la région doivent intégrer une perspective de genre dans leurs décisions, afin que la « tyrannie de l’urgence » cesse de prendre le pas sur la sécurité des femmes.