La pandémie du COVID-19 a rapidement détérioré la situation des droits humains dans la région euro-méditerranéenne. Citons quelques tendances inquiétantes : la fermeture des frontières empêche les migrant.e.s et les réfugié.e.s de chercher une protection transfrontalière ; le ralentissement économique érode les droits économiques et sociaux de millions de citoyen.ne.s ; l’enfermement dans les foyers a augmenté les niveaux de violence domestique, et la criminalisation des rassemblements sociaux modifie les rapports de force entre les sociétés et leur gouvernement.
L’Algérie est un exemple flagrant de cette dernière tendance. En quelques semaines, le COVID-19 a fait ce que plusieurs gouvernements n’avaient pas réussi à faire par la répression, le compromis et le dialogue : il a mis fin, pour un temps au moins, au mouvement de protestation connu sous le nom de Hirak, un mouvement qui, pendant un an, avait paralysé le régime et sapé la légitimité populaire du gouvernement. L’évolution en Égypte est tout aussi significative. Le régime militaire a vu dans le COVID-19 une occasion de réprimer davantage les défenseurs des droits humains et ses opposants politiques, sans grande condamnation internationale. Sur le continent européen, les gouvernements de Hongrie et de Pologne ont également utilisé le COVID-19 pour restreindre la vie démocratique et les droits. Dans la plupart des démocraties libérales occidentales, des lois d’urgence réduisant les libertés et les droits fondamentaux ont été adoptées avec un large soutien populaire. Bien qu’il soit encore trop tôt pour prédire l’évolution de ces tendances, elles sont en effet inquiétantes.
Mais ces tendances négatives ne sont pas les seules que l’on peut observer : en parallèle, des initiatives et des évolutions inspirent espoir et confiance en l’avenir. La pandémie mondiale du COVID-19 a démontré la nécessité de renforcer la collaboration multilatérale entre les États et la coopération internationale entre les entreprises et les sociétés. Les entreprises technologiques offrent de nouveaux outils de communication en ligne, plus puissants, qui éclipsent les solutions habituelles. Et l’environnement ne s’est jamais senti aussi bien.
A EuroMed Droits, nous avons suivi et documenté ces développements et ceux qui y sont liés. Nous avons pris la parole lorsque nous avons vu des responsables transgresser les droits que nous nous efforçons de promouvoir et de protéger, et nous avons soutenu nos membres et partenaires chaque fois qu’ils ont été mis sous pression. Avec notre bulletin d’information COVID-19, nous souhaitons créer un outil qui fournit des mises à jour systématiques sur les développements actuels et sur les opportunités issues de la pandémie.
Nous pensons qu’un tel bulletin d’information renforcera la sensibilisation aux défis et aux opportunités de mieux promouvoir les droits humains. Nous pensons également qu’il incitera nos interlocuteurs à agir dans le bon sens à ce moment crucial de l’histoire de la région.
Dans ce premier numéro, quatre courts articles traitent de l’impact de la pandémie sur la situation des droits humains : le sort des défenseurs des droits humains emprisonnés en Égypte, l’accès limité aux soins de santé pour les migrant.e.s et les réfugié.e.s, les mesures de protection contre la violence à l’égard des femmes, et l’absence d’amnistie pour les critiques d’Erdogan en Turquie.
Ce bulletin d’information contient également des liens vers des publications récentes d’EuroMed Droits sur cette question et vers des actions importantes menées par nos membres et partenaires.
Je vous souhaite une bonne lecture !
Rasmus Alenius Boserup
Directeur exécutif