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Deux avocates françaises refoulées du territoire marocain, placées en rétention sans droit puis expulsées

Ce lundi 12 février, deux avocates françaises, Ingrid Metton et Olfa Ouled, se sont vues refuser l’entrée sur le territoire marocain à leur arrivée à Casablanca et ont été placées en rétention sans droit pendant plus de 18 heures, avant d’être expulsées du territoire le mardi 13 février.

Ingrid Metton et Olfa Ouled, avocates au barreau de Paris, effectuaient un déplacement au Maroc pour rendre visite à leurs clients, des prisonniers sahraouis originaires de Gdeim Izik. Ces avocates avaient déjà été intimidées à plusieurs reprises, notamment en mai 2017, lors d’une audience à la Cour d’appel de Rabat. Empêchées de s’exprimer, ces avocates avaient alors été expulsées de la salle d’audience.

Le Président d’EuroMed Droits, Michel Tubiana, dénonce cette nouvelle atteinte portée au droit de la défense :

« Le refoulement de Maitre Metton et Maitre Ouled est inacceptable, en contradiction flagrante avec le droit international et la convention liant les Barreaux de France et du Maroc.

Les avocats ont le droit d’assister leurs clients tout au long de la procédure. Interdire à Me Metton et Ouled d’accéder au Maroc revient à leur interdire d’exercer leur mission de défense.

EuroMed Droits appelle les autorités marocaines à revenir sur cette décision. »

 

Historique
En octobre 2010, un groupe de citoyens sahraouis dresse un campement pacifique à Gdeim Izik, près de Laâyoune (la ville principale du Sahara occidental), pour attirer l’attention sur les mauvaises conditions socio-économiques de leur région. Le camp compte jusqu’à 15 000 personnes. Les autorités marocaines sur place négocient alors les possibilités de démantèlement du camp avec des représentants des Sahraouis présents dans le campement. Si un accord semble avoir été conclu, certains des responsables marocains auraient ordonné un démantèlement plus hâtif et le 8 novembre 2010, des forces de l’ordre marocaines interviennent pour démanteler le camp de protestation. Un nombre significatif de citoyens sahraouis refusent de partir; de violents affrontements ont lieu. Le bilan est lourd : dix membres des forces de l’ordre et deux civils sont tués, on dénombre plusieurs centaines de blessés. En parallèle, une vingtaine de personnes sont arrêtées. Ces affrontements sont les plus violents depuis le cessez-le-feu de 1991.
En 2013, les prisonniers sahraouis ont été condamnés par un tribunal militaire : deux d’entre eux à deux ans d’emprisonnement, les autres à des peines allant de vingt ans à la perpétuité. Suite à une réforme de la justice militaire opérée en juillet 2015 en vertu de laquelle les civils ne peuvent plus être jugés par un tribunal militaire, la Cour de cassation a décidé en juillet 2016 de renvoyer l’affaire devant la Cour d’appel de Rabat. Le nouveau procès, civil, a débuté le 26 décembre dernier et s’est terminé le 19 juillet 2017 par un verdict qui a reconduit les peines prononcées par le tribunal militaire. Les accusés, leurs proches et plusieurs associations internationales de défense des droits humains, dont EuroMed Droits, dénoncent « de graves irrégularités » dans la procédure, contraires au droit international.