Bruxelles, 20 juillet 2017 – En amont du Conseil d’association UE-Egypte du 25 juillet, EuroMed Droits exhorte l’UE à soulever publiquement ses préoccupations en matière de droits humains avec leur homologue égyptien. Nous estimons que cette réunion de haut niveau devrait être l’occasion de faire passer un message à l’Egypte et à l’opinion publique en Europe : que l’UE n’approuve pas les politiques répressives égyptiennes et demande un respect des droits humains et une réforme démocratique.
En juin, le point 4 de la déclaration de l’UE lors de la 35e session du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies a été retiré en raison d’une opposition catégorique de certains États membres à un langage critique envers les droits humains. La division parmi les États membres de l’UE est regrettable et a signalé à l’Egypte que sa situation en matière de droits humains n’est apparemment plus préoccupante en Europe.
Cependant, la répression de toute forme d’opposition s’aggrave:
- Les cas de disparitions forcées, pour des périodes allant jusqu’à sept mois, ont augmenté depuis 2015. Les victimes comprennent des enfants de moins de 14 ans, qui sont torturés en détention pour obtenir des condamnations lors d’épreuves ultérieures. Il y a eu plusieurs cas documentés d’exécutions extrajudiciaires, généralement liées à des disparitions forcées. Les organisations de défense des droits de l’homme ont documenté plusieurs procès qui ne respectaient pas les normes internationales ou égyptiennes de procès équitable, comme les civils soumis à des procès militaires et à des procès de mort en masse;
- Le 29 juin, le Président Sisi a approuvé une nouvelle loi régissant le travail des organisations non gouvernementales (ONG) qui restreint sévèrement leurs activités. Cette loi rendra presque impossible à une organisation indépendante de la société civile de survivre en Egypte. Cela constituera également un obstacle majeur à la mise en œuvre des priorités d’un partenariat UE-Egypte, qui devrait être formellement adopté au Conseil d’association UE-Egypte. Les priorités du partenariat permettraient de canaliser jusqu’à 699 millions d’euros en Égypte, pour le soutien budgétaire direct au gouvernement et le soutien aux ONG locales. Cependant, avec la loi nouvellement adoptée pour les ONG, il n’est pas certain que des organisations indépendantes de la société civile soient encore en activité pour servir cet objectif. Toutes les ONG internationales de défense des droits de l’homme ont déjà quitté l’Egypte depuis 2012 en raison de la répression judiciaire des autorités sur leur travail dans le cadre de l’affaire 173/2011, mais cette nouvelle loi signifie que les ONG restantes pourraient se trouver incapables d’opérer.
- Les défenseurs des droits de l’homme ne sont pas seulement harcelés en Egypte, mais aussi en Europe, comme cela s’est produit lors d’un événement organisé par EuroMed Droits en Mai dernier à Rome;
- La détention et le harcèlement de militants politiques des partis de l’opposition, y compris d’avocats des droits humains et du potentiel du candidat à la présidence de 2018 Khaled Ali, ont continué sans relâche. La répression des défenseurs des droits humains, des journalistes et des personnalités de l’opposition politique a atteint des niveaux sans précédent. Du 15 au 18 juin 2017, quelques 170 militants de l’opposition et défenseurs des droits humains, qui protestaient le transfert des îles Tiran et Sanafir en Arabie Saoudite, ont été arrêtés dans le but de faire taire la dissidence;
- L’accès à au moins 123 sites Web a été bloqué en Egypte à compter du 13 juillet 2017.
Cette répression ne produit pas de stabilité ni de sécurité, bien au contraire: les attaques terroristes augmentent et deviennent bien plus mortelles. L’état d’urgence et la non-application de la Constitution de 2014 empêchent toute voie pacifique d’expression politique et ouvrent la voie au radicalisme. Pendant ce temps, plus de 100 chrétiens coptes égyptiens ont été tués dans des attentats terroristes depuis décembre 2016. Le gouvernement du président Sisi souligne le sort des coptes, mais ne montre pas la volonté de les protéger en pratique.
À la lumière de cette aggravation de la répression de la société civile égyptienne, l’UE ne devrait pas se limiter à une diplomatie de couloir le 25 juillet, mais condamner publiquement ces développements extrêmement préoccupants. L’UE ne peut s’attendre à avoir une relation bilatérale prospère avec un pays qui éradique sa propre société civile et verrouille toute forme de dissidence pacifique.