Communiqué de Presse
Bruxelles, 20 Septembre 2018
EuroMed Droits exprime sa forte préoccupation quant aux conclusions de la réunion informelle européenne de Salzbourg, durant laquelle l’Autriche, qui tient actuellement la présidence tournante de l’UE, a demandé à ses homologues européens d’approfondir le dialogue avec l’Egypte sur la question migratoire.
Le 16 septembre, le Chancelier fédéral autrichien Kurz et le Président du Conseil européen Tusk ont visité le Caire pour discuter avec le Président Al-Sisi de mesures visant à prévenir les départs depuis les côtes égyptiennes vers l’Europe, de la stabilité régionale et d’un futur potentiel sommet entre l’UE et la Ligue des Etats arabes. Kurz a souligné l’efficacité du Président Al-Sisi à empêcher des bateaux à naviguer vers l’Europe.
Il est très décevant que les droits humains n’aient pas été abordés, et ce alors que Messieurs Tusk et Kurz ont voyagé au Caire quelques jours à peine après la condamnation à mort collective prononcée le 8 septembre à l’encontre de 75 personnes impliquées dans le procès Rabaa. Le régime égyptien mène actuellement une répression généralisée contre la dissidence : plus de 800 personnes ont été tuées dans les massacres de 2013 commis par la police et les forces de sécurité, plus de 1250 personnes ont fait l’objet de disparitions forcées et plus de 60 000 personnes ont été emprisonnées depuis la prise de pouvoir d’Al-Sisi. Les organisations de la société civile et les défenseurs/ses des droits humains, y compris celles et ceux travaillant sur le thème de la migration, sont harcelés, poursuivis en justice et forcés à cesser leurs activités.
Les propositions avancées envisagent l’approfondissement d’une coopération déjà engagée au niveau bilatéral (par ex. utilisation de fonds européens pour la coopération policière relative au crime transfrontalier entre l’Egypte et l’Italie) avec un pays sans législation sur l’asile, sans respect en droit ou en pratique des droits des personnes migrantes, sans garanties pour les droits des personnes réfugiées, notamment en violant le principe de non-refoulement et en privant de liberté les personnes réfugiées reconnues par le HCR. Cette annonce démontre une fois de plus que l’UE est prête à marchander sur les droits des personnes migrantes et réfugiées pour des intérêts géopolitiques, en s’éloignant de ses obligations des droits humains.
L’approche sécuritaire envers la migration est une politique à courte-vue qui n’aidera pas à maintenir la fragile stabilité en Egypte. Les droits humains devraient être une priorité pour aider le pays à renforcer ses institutions, pour le bénéfice de l’Egypte et de l’Europe.