Rechercher

REMDH, CIDSE, APRODEV et QCEA – Le Parlement européen devrait reporter son vote de consentement sur l’accord ACAA

APRODEV, CIDSE, le Réseau euro-méditerranéen des Droits de l’Homme (REMDH) et le Quaker Council for European Affairs (QCEA) prient instamment les membres du Parlement européen impliqués dans la Commission du commerce international (INTA) de suspendre la procédure de consentement visant le protocole ACAA sur l’évaluation de la conformité et l’acceptation des produits industriels signé dans le cadre de l’Accord d’association UE-Israël, jusqu’à ce que les pratiques d’Israël soient en conformité avec les normes du droit international humanitaire (DIH) et du droit international des droits de l’homme (DIDH). Ces organisations appellent aussi la Commission des Affaires étrangères du parlement européen (AFET) à soutenir cette démarche.

Nécessité de maintenir la cohérence

L’extension des relations bilatérales entre l’UE et Israël doit rester en harmonie avec la ferme condamnation par l’Union européenne des politiques et des pratiques d’Israël qui enfreignent le droit international. Le Traité sur l’Union européenne stipule l’obligation pour l’UE de veiller à « la cohérence entre les différents domaines de son action extérieure et entre ceux-ci et ses autres politiques » (article 21 du TUE). Cette extension doit aussi se conformer aux obligations de l’UE en matière de droits de l’Homme. L’Article 2 de l’Accord d’association UE-Israël dispose que « les relations entre les parties, de même que toutes les dispositions du présent accord, se fondent sur le respect des droits de l’homme et des principes démocratiques, qui inspire leurs politiques internes et internationales et qui constitue un élément essentiel du présent accord ». Un vote de consentement en faveur du protocole ACAA équivaudrait à une acceptation des violations des droits de l’Homme par Israël sur son propre territoire, et des violations du DIH et du DIDH perpétrées dans les Territoires occupés (TPO). Le message ainsi envoyé à Israël l’inciterait à penser qu’il peut espérer un développement et une amélioration de ses relations avec l’Union européenne tout en poursuivant ses politiques illégales, aussi bien en Israël que dans les TPO. En 2008, pour des raisons similaires, le Parlement européen a décidé du gel de son vote de consentement sur la participation d’Israël aux programmes communautaires.

Une bonne occasion d’appliquer l’approche donnant-donnant (« more for more »)

De plus, le vote de consentement concernant le protocole ACAA serait une bonne occasion pour les membres du Parlement européen d’appliquer le principe de conditionnalité positive (ou donnant-donnant) préconisé par la communication de la commission européenne de mai 2011, « Une nouvelle réponse à un voisinage en mouvement », approuvée par le Conseil des Affaires étrangères en juin 2011 et par le Parlement européen en décembre de la même année. La conditionnalité positive est un instrument important pour la promotion de la démocratie et du respect des droits de l’Homme, mais elle devrait aussi constituer un outil crucial dans les relations de l’Union avec ceux de ses partenaires qui sont engagés dans des conflits prolongés, afin de promouvoir la paix et la stabilité en veillant à la stricte observation du droit international.[1]

Définir des points de référence reflétant les obligations d’Israël en sa qualité de puissance occupante

Pour la mise en œuvre de la conditionnalité positive, la Communication de mai 2011 préconise de déterminer des points de référence (benchmarks) pour une « démocratie solide et durable », qui puissent permettre d’évaluer les progrès des partenaires du voisinage en faveur du renforcement de la démocratie et du respect de l’état de droit. Toutefois, ces points de référence ne prennent pas en compte l’existence de conflits prolongés dans la région couverte par la politique européenne de voisinage (PEV). C’est pourquoi APRODEV, CIDSE, le REMDH et le QCEA recommandent à l’UE, y compris au Parlement européen, d’y ajouter des critères supplémentaires tirés du DIH et du DIDH, de façon à prendre aussi en considération les situations de conflit – et donc, dans le cas d’Israël, à tenir compte de ses obligations de puissance occupante vis-à-vis de la population palestinienne. Ces points de référence devraient inclure, entre autres[2] :

– la protection des civils, fondée sur les principes fondamentaux du DIH, à savoir distinction, nécessité militaire et proportionnalité ;
– le droit imprescriptible à la vie, y compris l’interdiction des exécutions sommaires et le droit de ne pas être soumis à la torture et aux mauvais traitements ;
– le droit fondamental à la liberté de circulation ;
– le respect de toute une série de droits économiques, sociaux et culturels pour les Palestiniens ;
– l’interdiction de procéder à une modification démographique importante dans la composition des territoires occupés ;
– l’interdiction des châtiments collectifs ;
– le droit à un procès équitable ;
– et la lutte contre l’impunité.
Avant de donner son assentiment aux accords signés entre l’UE et Israël, le Parlement européen devrait d’abord évaluer la situation d’Israël par rapport à ces points de référence.[3]

Il est également important de noter qu’Israël ne respecte pas certains des principes des droits de l’Homme inclus dans les critères d’une démocratie solide et durable, telles que la liberté d’association et d’expression et la non-discrimination à l’égard des minorités à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues.[4]

Compte tenu de la nécessité de respecter la cohérence dans la politique de l’UE face aux violations continues du droit international par Israël, APRODEV, CIDSE, le REMDH et le QCEA recommandent que les membres du Parlement européen suspendent leur vote de consentement en faveur du protocole ACAA jusqu’à ce qu’Israël ait fait des progrès tangibles en ce qui concerne le respect de ses obligations envers le droit international. D’une manière générale, les organisations signataires estiment que le principe de conditionnalité positive (approche donnant-donnant) devrait être appliqué par l’Union européenne dans ses relations avec les pays du sud de la méditerranée.

Vous pouvez télécharger la lettre ici

Vous pouvez télécharger l’Annexe I ici

Vous pouvez télécharger l’Annexe II ici

[1] Pour de plus amples détails sur cette recommandation, voir « EU-Israel relations : Promoting and Ensuring Respect for International Law », rapport publié par APRODEV et le REMDH en février 2012. Disponible à l’adresse : https://euromedrights.org/eng/?p=11155.html

[2] Un rappel actualisé des violations par Israël de ces droits fondamentaux et de ses propres obligations envers le droit international humanitaire figure à l’Annexe I de cette lettre.

[3] Pour de plus amples détails sur cette recommandation, voir « EU-Israel relations : Promoting and Ensuring Respect for International Law », rapport publié par APRODEV et le REMDH en février 2012 (p. 56).

[4] Voir Annexe II pour un complément d’information sur les violations de la liberté d’expression et la liberté d’association, ainsi que sur la discrimination exercée contre la minorité arabe palestinienne en Israël.