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La levée de l’état d’urgence en Algérie – un trompe l’oeil

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Le 24 février 2011, le gouvernement algérien a levé l’état d’urgence en réaction à la vague de protestations populaires qui déferlait alors sur la région. Dans quelle mesure cette décision a-t-elle mis fin à la longue série d’atteintes aux droits de l’Homme qui s’étaient produites sous l’état d’urgence ? A-t-elle effectivement permis aux citoyens algériens d’exercer leurs droits à la liberté d’association, de réunion et de rassemblement ? Quels obstacles et quels facteurs de résistance continuent de s’opposer à l’exercice de ces droits ?

L’état d’urgence, qui avait été décrété le 9 février 1992 à la suite de l’annulation des résultats électoraux du premier tour des législatives, remportées par le Front islamique du salut, a eu un profond impact sur la société civile algérienne. Au cours des 20 années suivantes, la société civile a été affaiblie systématiquement, entre autres par l’excès d’ambiguïté de certaines dispositions, par l’utilisation des moyens de la lutte antiterroriste pour réprimer plus largement toute voix critique, et par l’impunité accordée à ceux qui s’étaient rendu responsables de violations des droits humains pendant la guerre civile.

La levée de l’état d’urgence n’a pas, jusqu’à présent, signifié de meilleure garantie pour l’exercice des droits et des libertés fondamentales, notamment pour les organisations qui exercent leurs activités dans le domaine des droits de l’Homme et qui se penchent sur les abus massifs qui se sont produits pendant la guerre civile. Le harcèlement des militants par la police, l’interdiction injustifiée de manifestations et des réunions publiques, de même que le recours à des pratiques administratives abusives pour entraver la création des associations : ces tactiques continuent d’être communément utilisées pour affaiblir la société civile et entraver son action.

Dans le domaine législatif, la nouvelle loi organique sur l’information, perpétue les restrictions érigées à l’encontre de la liberté d’expression, certaines infractions étant même passibles de peines d’emprisonnement. La nouvelle loi sur les associations, réprime la liberté d’association encore plus qu’auparavant.

En bref, même si en principe la levée de l’état d’urgence devait être le signe d’une évolution positive, elle n’a guère, jusqu’à présent, contribué à transformer le cadre répressif dans lequel la société civile algérienne exerce ses activités. D’un point de vue pratique aussi bien que juridique, les organisations de la société civile sont toujours confrontées à d’importants obstacles qui entravent leur travail de promotion du respect des droits de l’Homme et des libertés fondamentales. Toutefois, la persistence et le renforcement des organisations de la société civile, malgré les obstacles auxquels elles ont fait et continuent à faire face, pourrait constituer le moteur de changements importants.