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Journée Mondiale Des Réfugié.e.s – blocages en mer, entraves au droit d’asile : le cas tunisien

Bruxelles, 20 Juin 2019

En cette Journée mondiale des réfugié.e.s, EuroMed Droits met l’accent sur la pratique actuelle visant à empêcher les débarquements de personnes sur les côtes de la mer Méditerranée, notamment en Tunisie. À bien des égards, cette situation est emblématique des obstacles auxquels les personnes réfugiées font face pour obtenir protection et accéder à leurs droits dans la région euro-méditerranéenne. Elle est aussi emblématique des solidarités sans faille d’associations et individuelles qui s’expriment envers les personnes réfugiées.

Bien que le nombre total de décès en mer Méditerranée ait diminué par rapport à la même période l’année dernière, le pourcentage de personnes disparues en mer est passé de 1 sur 29 en 2018 à 1 sur 6 en 2019, selon les données de juin 2019 du Haut-Commissariat des Nations unies pour les Réfugiés (HCR). 559 personnes ont péri en mer en tentant d’atteindre l’Europe en 2019, dont 343 à travers la seule Méditerranée centrale.

Cela s’explique par une croissante criminalisation des ONG qui pratiquent les sauvetages en mer, par une presque absence de dispositifs nationaux de recherche et de sauvetage en mer, par un renforcement de la coopération en matière de gestion des frontières avec les pays dits ‘tiers’ et par une dérogation désormais conventionnelle aux obligations humanitaires imposées par le droit international.

Cependant, la politique de fermeture des ports et la criminalisation de la migration irrégulière adoptées par les États européens, et progressivement par leurs voisins de la rive sud, sont régulièrement remises en question par des organisations telles que le Conseil de l’Europe, les « rapporteurs spéciaux » des Nations Unies, et le Bureau des droits fondamentaux de FRONTEX.

Par ailleurs, la collaboration dans les procédures d’interception maritime menées par les garde-côtes libyens –soutenus et équipés avec les fonds européens– mène ceux qui essayent de s’enfuir à l’enfer des camps d’enfermement, ce qui entraîne une violation systématique des droits fondamentaux et des conventions internationales relatives au droit de la mer et aux droits humains.

L’externalisation vers l’Afrique du Nord de la mise en œuvre de la politique migratoire de l’UE et de ses États membres, dans le contexte de l’intensification des affrontements en Libye, a conduit à une augmentation inexorable des arrivées terrestres et maritimes vers la Tunisie. Entre le dernier trimestre de 2018 jusqu’aujourd’hui, le HCR a enregistré 1.843 personnes, dont 1.233 personnes réfugiées et 600 personnes demandeuses d’asile. En Tunisie, où aucune loi sur l’asile n’a été adoptée, le droit au travail des personnes reconnues comme réfugiées par le HCR n’est pas garanti et aucun soutien psychologique réel n’est fourni aux personnes en situation de vulnérabilité. Les mineur.e.s, y compris les mineur.e.s non accompagné.e.s, sont privé.e.s de liberté dans des centres non répertoriés.

Les répercussions sur les personnes débarquées, avec des promesses de protection et d’inclusion dans le pays ou qui sont sujettes à des pratiques de retour ‘volontaire’, sont vastes. Les pratiques actuelles s’inscrivent dans le cadre de la proposition de créer des « plateformes régionales de débarquement », notamment en Tunisie bien que cette proposition ait été constamment rejetée par le gouvernement tunisien.

Quatre ans après un ‘tournant’ dans la gestion humanitaire des personnes en quête de protection, la Tunisie se retrouve à accepter et à participer activement aux programmes de renforcement du contrôle des frontières dans le cadre du Fonds fiduciaire d’urgence de l’UE pour l’Afrique ou à la consolidation d’un partenariat bilatéral dans le domaine de la sécurité et de la lutte contre le terrorisme.

La violation des obligations d’aide humanitaire et des responsabilités des États en matière d’intervention en mer, ainsi que les tentatives d’accorder différents types de droits à différentes catégories de migrants (en dehors des dispositions prévues par la Charte internationale des droits de l’Homme) a un impact significatif sur l’approche des questions migratoires des pays du voisinage sud, comme la Tunisie, qui adoptent de fait une politique migratoire fondée sur la gestion de l’urgence et de la sécurité à ses frontières et dans le pays.