Rechercher

Féminicide en Algérie : où est le cadre juridique ? 

Ces dernières années, le féminicide est devenu une question épineuse, attirant l’attention de la société civile algérienne comme une urgence primordiale. Selon Féminicides Algérie, une initiative lancée par deux militantes algériennes, neuf cas de féminicides ont déjà été recensés en 2022, en moins de trois mois.

Bououd Roufaida, la plus récente victime de féminicide (survenu le 1er mars), n’avait que neuf ans. En 2021, environ 55 femmes de différentes tranches d’âge ont été tuées. Dans plusieurs cas, les agresseurs étaient des membres de la famille proche, à savoir des pères, frères, oncles ou maris. Cela soulève de sérieux doutes sur le rôle protecteur que la famille est censée avoir joué pour ces victimes.  

Pourtant, la position des femmes algériennes dans la société a connu des améliorations considérables durant la dernière décennie. Des statistiques récentes issues d’un rapport de l’UNESCO (2021) révèlent que 62% des diplômé.e.s de l’enseignement supérieur sont des étudiantes, tandis que l’Algérie se classe en tête de liste au niveau international, avec un taux de 48,5% de femmes ingénieures. Néanmoins, malgré ces indicateurs, les femmes sont toujours soumises à la règle stricte d’une société patriarcale, renforcée en son socle par un cadre juridique national. 

Législation pour l’émancipation des femmes 

Jusqu’à aujourd’hui, la construction sociale conventionnelle en Algérie reste prédominante ; la société relativement conservatrice participe à maintenir un écart palpable entre les genres. Les fondements juridiques, à savoir le Code algérien de la famille et le Code pénal, imposent aux femmes des conditions de vie clairement contraignantes pour l’égalité. Ainsi, le Code de la famille adopté en 1984 regroupe des règles inspirées de la Charia pour déterminer les relations familiales. 

Le Code pénal, introduit en 2015, promettait des avancées – à travers les articles 266Bis et 333Bis – en précisant les poursuites judiciaires auxquelles les auteurs de différentes formes de violence à l’égard des femmes seraient soumis, à savoir des amendes et/ou des peines d’emprisonnement. Cependant, des zones d’ombre dans le texte permettent la perpétuation de l’assujettissement des femmes : la « clause de pardon » permet à un agresseur d’échapper aux poursuites pénales lorsqu’il est officiellement pardonné par sa victime. Le sort des femmes algériennes victimes de féminicide est partiellement dû à ce manque de protection juridique nationale contre les agresseurs potentiels.