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Algérie : Des organisations nationales et internationales des droits humains appellent à la libération immédiate des détenus militants et journalistes Algériens

Alors que le monde entier est focalisé sur la lutte contre la propagation de la pandémie du COVID-19, l’Algérie connaît un acharnement sans précédent contre les militants et les journalistes du Hirak. Tandis que ce dernier est suspendu dans les rues algériennes à cause de la pandémie, le régime Algérien enchaîne, depuis le début du mois de Mars, une série de condamnations à l’encontre des militants et journalistes avec des procédures ne respectant point les droits garantis par l’arsenal juridique algérien à l’instar de la Constitution et du code des procédures pénales et en flagrante contradiction avec les obligations de l’Algérie en vertu des pactes internationaux.

Karim Tabbou, militant politique algérien, fondateur du parti Union Démocratique et Sociale (UDS) et figure du Hirak en Algérie, a été condamné le 24 mars 2020 à un an de prison ferme par la cour de Ruisseau à Alger. Les procédures de sa condamnation sont une violation explicite au principe d’un procès équitable constitutionnellement garanti en vertu des dispositions de l’article 56 de la Constitution Algérienne et signe d’un grave dérapage dans la justice en Algérie. En effet, le 24 mars la cour d’Appel de Ruisseau à Alger fixe son procès sans informer la défense. Le procès s’est poursuivi alors qu’il était absent. Tabbou, connaissant alors des convulsions et une paralysie faciale suite à un malaise engendré par le refus de la demande de report du procès. Le refus de la direction de la prison de Koléa, mercredi 25 mars, aux avocats de lui rendre visite alors qu’il demeure souffrant est une violation à l’inviolabilité de la personne humaine garantie par l’article 40 de la Constitution et une atteinte à la dignité proscrite par le même article.

Ibrahim Daoudji, arrêté depuis le 16 mars 2020 dans la ville de Mostaganem alors qu’il était à bord de sa voiture privée, et il a été escorté en garde à vue dans la capitale dans des circonstances mystérieuses. D’après des sources médiatiques, il est en grève de la faim depuis le 16 mars et sa vie est en danger de mort. L’absence d’un avocat lors de la garde à vue présente une violation du principe de présomption d’innocence constitutionnellement garanti en Algérie en vertu des articles 58 et 59 ainsi que le droit d’entrer en contact avec son avocat par les dispositions de l’article 60 . La grève de la faim prolongée et non soignée est une flagrante atteinte au droit à la vie, un droit inhérent à toute personne humaine et liée au droit à la santé garanti par l’article 66 de la Constitution où on peut lire que “Tous les citoyens ont droit à la protection de leur santé”.

Samir Belarbi, militant algérien et l’un des fondateurs du mouvement Barakat, le 07 mars 2020, il a été arrêté par les autorités de police et il demeure depuis sous mandat de dépôt. Le 25 mars 2020, la chambre d’accusation de la cour de Ruisseau à Alger, a rejeté sa demande de liberté provisoire introduite par les avocats. Rappelant qu’il a été arrêté pour la première fois le 17 septembre 2019 et jugé pour trois mois de prison ferme pour « atteinte à l’intégrité territoriale » et « diffusion ou détention de publication portant atteinte à l’intérêt national ». Il a été relaxé le 3 février par le tribunal de Ruisseau.

Slimane Hamitouche, coordinateur national de la Coordination nationale des familles des disparus (CNFD) et SOS disparus. Il a été élevé par son oncle maternel qui a été kidnappé dans les années 90 et n’a plus donné signe de vie depuis. Depuis 20 ans, il lutte auprès des familles des disparus et devient une figure infatigable du Hirak. N’ayant manqué aucune manifestation depuis février 2019. Il a été placé sous mandat de dépôt à la prison d’El Harrach et accusé « d’atteinte à l’unité nationale » et « d’incitation à attroupement » depuis le 07 mars. Le 25 mars, tout comme Samir Belarbi, la cour rejette la demande de sa mise en liberté et confirme sa mise sous mandat de dépôt. Cette cascade d’arrestations auprès des militants en Algérie frappe en plein fouet la liberté de manifestation jadis garantie par l’article 49 de la Constitution étant une pratique intimidante et poussant à l’autocensure.

Abdelouahab Fersaoui, président de RAJ Algérie, a été arrêté par la police à Alger, le 10 octobre 2019, lors d’un rassemblement de soutien aux détenus d’opinion. Il est poursuivi pour « incitation à la violence » et « atteinte à l’intégrité territoriale ». Depuis cette date, la justice a rejeté toutes les demandes de sa libération, et a prorogé à chaque fois sa détention : son mandat de dépôt, qui devait expirer le 10 février dernier, a été renouvelé de quatre mois par le tribunal de Sidi-M’hamed2. Le 23 mars, le même tribunal requiert contre lui deux ans de prison ferme et une amende de 100000 dinars algérien (730€) avec renvoi du verdict pour le 06 avril. La détention provisoire est une mesure exceptionnelle en vertu de l’article 59 de la Constitution qui poussée au-delà des délais imposés par loi demeure une arrestation arbitraire.

Hadj Ghermoul, militant de la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme (LADDH) et membre du Comité national de défense des droits des chômeurs (CNDDC), était le premier à brandir en janvier 2019 une pancarte contre le 5e mandat de l’ex-président Abdelaziz Bouteflika. Il a été condamné, mercredi 25 mars à un an de prison avec sursis et à 50 000 dinars (3730 €) d’amende par le tribunal de Mascara alors qu’il demeure chômeur.

Les entraves ont aussi englobé le travail journalistique. C’est ainsi que Khaled Drareni , journaliste indépendant, fondateur du site internet Casbah Tribune et correspondant en Algérie de la chaîne internationale francophone TV5 Monde et de Reporters sans frontières (RSF), a été mis sous contrôle judiciaire le 09 Mars dernier après être arrêté le 07 mars alors qu’il couvrait une manifestation du Hirak à Alger. Le 25 Mars la cour de Ruisseau, annule le contrôle judiciaire et décide de le placer sous mandat d’arrêt. Le 29, le tribunal de Sidi M’hamed d’Alger confirme l’exécution de la décision de la chambre d’accusation de la cour d’Alger et le place sous mandat de dépôt à la prison d’El Harrach. Le 31 mars, on apprend par son avocate qu’il a été transféré à la prison de Koléa.

Sofiane Merakchi, journaliste producteur pour France 24 et RT et correspondant à la chaîne de télévision libanaise Al Mayadeen, a été placé en détention provisoire depuis le 26 septembre 2019 par le tribunal de Bir Mourad Raïs pour « recel de matériel » et pour « fourniture des images des manifestations du vendredi 20 septembre à la chaîne Al Jazeera et d’autres médias étrangers ». Il est de facto le premier journaliste algérien arrêté depuis le Hirak. Sa demande de remise en liberté a été rejetée et le 29 mars 2020, le procureur de la République près le tribunal de Bir Mourad Raïs a requis une peine de deux ans de prison ferme et une amende de cinq fois le coût du matériel saisi.

Belkacim Djir, journaliste, détenu depuis le 16 juillet 2019 pour une affaire de droit commun, est en détention préventive abusive depuis sans fixation d’une date de procès. Il demande tout simplement le droit à un procès équitable.

NOUS, Organisations Nationales et Internationales des Droits humains signataires rappelons les autorités algériennes que le droit d’expression est un droit acquis et fondamental pour toute Démocratie remettant en cause le fondement de la condamnation de tous les activistes et journalistes qui n’ont fait qu’exprimer leurs idées politiques ou relayer les informations d’un point de vue journalistique.

Il est important de mentionner qu’il est strictement inacceptable de condamner une personne pour ses avis politiques ou pour un devoir journalistique. Il est tout autant important de rappeler que ces pratiques liberticides violent les Pactes internationaux des droits humains que l’Algérie a jadis ratifiés et demeurent inconstitutionnelles.

Nous rejoignons les appels de détresse des avocats et de l’ensemble de la société civile et diaspora algériennes en condamnant le non-respect du code des procédures pénales algérien, des dispositions de la Constitution algérienne et des normes internationales d’un procès équitable. Nous considérons le non-respect du droit à la vie, de l’état de santé de l’inculpé ainsi que l’absence de la défense, la prolongation de la détention provisoire, la condamnation de la liberté journalistique et l’intimidation des journalistes une violation de droit dont la haute justice algérienne doit condamner ainsi que tous les corps juridictionnels en Algérie.

Nous appelons les autorités algériennes à libérer immédiatement tous les journalistes leur laissant la liberté et le droit de relater les informations en Algérie ainsi que tous les militants politiques et des droits humains et à arrêter toutes les poursuites judiciaires.

La liste des signataires :

Association Adala pour le droit à un procès équitable
Association Alter’solidaire
Association De Défense Des Libertés Individuelles (ADLI)
Association Marocaine Des Droits Humains
Association Vigilance Pour La Démocratie Et l’État Civique
Centre DAAM pour la Transition démocratique et le soutien aux droits de l’Homme
Collectif Des Algériennes et Algériens En Tunisie
EuroMed Rights
Fédération Internationale Pour Les Droits Humains
Forum Marocain des Jeunes Journalistes
Forum Tunisiens Des Droits Economiques Et Sociaux (FTDES)
Institut Prometheus Pour La Démocratie Et Les Droits Humains
Ligue Algérienne Des Droits De l’Homme
Ligue Tunisienne Des Droits De l’Homme
Mouvement Algérie Debout
Organisation ARTICLE 19
Organisation Libanaise Pour L’unité Et La Défense Des Droits Egaux ‘’ LOUDER’’
Organisation Marocaine Des Droits Humains
Rassemblement Actions Jeunesse RAJ- Algérie
Réseau REF