Rechercher

ALGERIE: 4 jeunes militants et défenseurs de droits de l’Homme poursuivis arbitrairement par la justice en Algérie

Le Réseau Euro-méditerranéen des Droits de l’Homme (REMDH), la Fédération internationale des droits de l’Homme, l’Organisation Mondiale contre la Torture (OMCT), le Collectif des Familles des Disparu(e)s en Algérie (CFDA), le Syndicat National autonome du personnel de l’administration publique (SNAPAP) avec le Syndicat nationale autonome des travailleurs de fabrication et transformation de papier et emballage (SNAT-FTPE) condamnent l’intensification des actes de harcèlement judiciaire à l’encontre des militants et défenseurs de droits de l’Homme en Algérie et expriment leur solidarité avec celles et ceux qui subissent la répression des autorités pour revendiquer leur droit à s’exprimer et manifester pacifiquement.

Nos organisations ont été informées de la convocation à comparaitre, aujourd’hui à 13h30, devant le Tribunal de Bab el Oued  à Alger de quatre militants et défenseurs de droits de l’Homme : Yacine Zaïd, syndicaliste et président de la section de Laghouat de la Ligue Algérienne pour la défense des droits de l’Homme (LADDH), Abdou Bendjoudi, l’un des responsables du Mouvement des jeunes indépendants pour le changement (MJIC), Lakhdar Bouzini, membre du Syndicat national autonome des personnels de l’administration publique (SNAPAP), Othmane Aouameur, membre du Réseau de défense de la Liberté et des Dignités (RDLD). Les quatre jeunes sont poursuivis pour « incitation à attroupement non armé » en vertu de l’article 100 du Code pénal.

Les faits qui leurs sont reprochés remontent au 26 avril 2012, lorsque les forces de police avaient procédé à l’arrestation d’une vingtaine de personnes, dont Yacine Zaïd, Abdou Bendjoudi, Lakhdar Bouzini et Othmane Aouameur, tenant un sit-in pacifique devant le Tribunal de Sidi M’hamed pour dénoncer le harcèlement judiciaire dont est victime Abdelkader Kherba, membre du Comité national pour la défense des droits des chômeurs (CNDDC) et de la LADDH. Retenus au commissariat – situé Place des Martyrs -, Yacine Zaïd, Abdou Bendjoudi, Lakhdar Bouzini et Othmane Aouameur avaient été interrogés sur les raisons de leur militantisme avant d’être relâchés dans la journée sans qu’aucune inculpation n’ait été formulée à leur encontre. Leur convocation leur a été notifiée seulement un mois et demi plus tard, le 13 juin dernier.

Nos organisations expriment leur profonde préoccupation face à l’intensification des procédures judiciaires arbitraires qui visent à sanctionner le libre exercice du droit au rassemblement pacifique des défenseurs des droits de l’Homme et à briser toute forme de solidarité émergente au sein de la société civile indépendante. En outre, nos organisations déplorent la condamnation prononcée en première instance, le 3 mai 2012, par la Cour de Sidi M’hamed à 1 an de prison avec sursis et 20 000 dinars d’amende (environ 200 euros) contre Abdelkader Kherba. Son audience d’appel est prévue le 8 juillet prochain devant la Cour d’Alger.

A l’heure où l’examen de l’Algérie dans le cadre de l’Examen Périodique Universel (EPU) vient de se conclure, l’intensification des actes de harcèlement judiciaire, qui constituent une violation de la constitution algérienne ainsi que des engagements internationaux pris par l’Algérie, ne font que mettre en évidence le dangereux décalage entre la pratique et le discours officiel défendant à l’international un bilan positif en matière de libertés fondamentales.

Nos organisations appellent les autorités algériennes à agir urgemment afin de:

  • Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de Yacine Zaid, Abdou Bendjoudi, Lakhdar Bouzini, Othmane Aouameur et Abdelkader Kherba ainsi que de l’ensemble des militants, défenseurs des droits de l’Homme et des syndicalistes algériens ;
  • Mettre un terme à toute forme de harcèlement, y compris judiciaire, à l’encontre de Yacine Zaid, Abdou Bendjoudi, Lakhdar Bouzini, Othmane Aouameuret Abdelkader Kherba ainsi que de tous les militants et les défenseurs des droits de l’Homme algériens, afin qu’ils puissent mener leurs activités pacifiques librement et sans entrave ;
  • Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement à:

–          l’article 1 qui dispose que « chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international »,

–          l’article 12.2, qui dispose que « l’État prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration »;

  • Garantir la liberté d’expression et de manifestation de l’ensemble des syndicalistes et défenseurs des droits de l’Homme en Algérie qui revendiquent leurs droits de manière pacifique, comme inscrit dans la Constitution algérienne aux articles 33 et 41 et dans le Pacte international relatif aux droits civils et politique, ratifié par l’Algérie.

Enfin, nos organisations demandent à l’UE et ses Etats membres de mettre en œuvre les Lignes directrices de l’UE sur les défenseurs des droits de l’Homme et d’apporter un soutien urgent et visible aux défenseurs des droits de l’Homme, notamment en assistant à leurs procès.