Les organisations signataires* condamnent l’interdiction arbitraire de quitter le territoire algérien pour une délégation de militants de droits de l’Homme et syndicalistes autonomes, bloquée au poste frontalier de Layoun (wilaya de Tébessa) depuis le matin de lundi 25 mars alors qu’ils devaient se rendre à Tunis pour participer au 13ème Forum social mondial qui se déroulera du 26 au 30 mars. Cette interdiction est une violation manifeste de la liberté de circulation aussi bien que des libertés de réunion et d’association garanties par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques ratifié par l’Algérie (articles 12, 21 et 22).
Le 25 mars, la délégation composée de 96 militants des droits de l’Homme, membres de SOS Disparus, de la Ligue Algérienne de Défense des Droits de l’Homme (LADDH), du Comité National pour la défense des droits des chômeurs (CNDDC) et de syndicalistes autonomes du Syndicat National Autonome du Personnel de l’Administration Publique (SNAPAP), est arrivée aux contrôles de frontières au niveau de Tébessa vers 3 heures du matin. Après presque six heures d’attente dans le froid, sans accès aux sanitaires et sans pouvoir se restaurer, la police des frontières leur a finalement notifié l’interdiction de quitter le territoire algérien alors que tous les membres des délégations étaient munis d’un passeport valide. Face à la contestation et à l’incompréhension des militants, la police des frontières n’a su motiver cette mesure autrement que prétextant ‘des ordres reçus’. La même interdiction a été réitérée à un petit groupe de la même délégation qui avait ensuite essayé de passer les contrôles au niveau de Souk-Ahras.
A l’heure actuelle, la délégation est toujours en attente d’obtenir l’autorisation de passer la frontière pour enfin pouvoir regagner Tunis et participer au Forum social mondial.
De plus, Hacene Ferhati, militant des droits de l’Homme et membre de SOS Disparus a de nouveau été empêché de quitter le territoire algérien aujourd’hui par la Police Algérienne des Frontières (PAF) à l’aéroport international de Houari Boumedienne, alors qu’il tentait de rejoindre Tunis par avion. Il se trouvait avec des membres du Front des Forces Socialistes (FFS) qui ont été autorisés à voyager. La PAF n’a fourni aucune explication quant au refus de laisser M. Ferhati sortir du territoire.
Nos organisations rappellent que ce n’est pas la première fois que les autorités algériennes entravent le déroulement d’un forum social. En 2010 déjà, le Forum social syndical maghrébin qui devait se tenir à Alger, a été interdit. Plus récemment en février 2013, l’organisation du Forum social syndical maghrébin a de nouveau été marquée par la répression des autorités policières à l’encontre des chômeurs algériens et étrangers, empêchant ainsi la tenue du forum[1].
Nos organisations déplorent cette violation de la liberté de circulation de syndicalistes autonomes et défenseurs de droits de l’Homme algériens qui a pour but d’isoler et d’affaiblir la société civile algérienne. Nos organisations appellent donc les autorités algériennes à :
– Lever immédiatement l’interdiction de quitter le territoire et ainsi permettre à la délégation algérienne de se rendre en Tunisie pour participer au Forum Social Mondial;
– Garantir les libertés de circulation, de réunion et d’association en conformité avec les dispositions de la constitution algérienne et du Pacte international pour les Droits civils et politiques (PIDCP), aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme, et aux autres instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par l’Algérie.
* Organisations signataires :
Le Collectif des familles des disparu(e)s en Algérie (CFDA), SOS Disparu(e)s, le Réseau euro-méditerranéen des droits de l’homme (REMDH), l’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), la Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l’Homme (LADDH), le Syndicat National Autonome du Personnel de l’Administration Publique (SNAPAP), le Réseau d’Avocats pour la Défense des Droits de l’Homme (RADDH) et l’association Agir pour le Changement Démocratique en Algérie (ACDA).
[1] Communiqué conjoint : « Algérie : vague de répression contre les militants du droit au travail », du 21 février 2013.