Osman İşçi, membre du Comité exécutif du Réseau euro-méditerranéen des droits de l’Homme, ainsi que 71 syndicalistes, comparaitront devant la 13e Haute cour pénale d’Ankara le 5 mars 2014 pour leur quatrième audience.
Le procès est en cours depuis le 10 avril 2013 et s’inscrit dans le cadre des procédures anti-terrorisme turques qui enfreignent clairement le droit à un procès équitable. Osman İşçi et les autres accusés sont des militants syndicaux et des droits de l’Homme, accusés de faire partie d’une organisation illégale en raison de leur critique pacifique des politiques du gouvernement turc.
Le 25 juin 2012, les forces de police anti-terrorisme ont arrêté Osman İşçi et 71 syndicalistes affiliés à la confédération « KESK ». Parmi eux, 28 individus, dont M. İşçi, ont été placés en détention provisoire dans un quartier pénitentiaire de haute sécurité pendant 8 à 10 mois[1]. Les accusés et leurs avocats n’ont pas été informés des charges retenues à leur encontre avant le 15 février 2013, dans la mesure où les dossiers étaient gardés secrets conformément à la loi anti-terrorisme turque. Une si longue privation de liberté sans accusation publique est en violation flagrante avec les obligations internationales de la Turquie[2].
Bien qu’Osman İşçi et les autres syndicalistes aient été libérés lors de la première audience le 10 avril 2013, dans son jugement, le tribunal spécial d’Ankara a maintenu les charges qui pesaient contre les 72 accusés.
Afin de s’assurer du respect des droits procéduraux des accusés, cette audience devrait faire l¡objet d’une observation indépendante, comme ce fut le cas pour les précédentes audiences. A de nombreuses reprises la Cour Européenne des Droits de l’Homme a condamné la Turquie pour le manque de garanties offertes à la défense. Dans son rapport d’observation de la première audience, le REMDH met en avant la violation de plusieurs éléments clés d’un procès équitable et émet de sérieux doutes quant à l’impartialité de la Haute cour pénale.
En conséquence, le REMDH :
– salue l’initiative de la Délégation de l’UE en Turquie et de plusieurs États membres qui ont envoyé des observateurs aux audiences précédentes et les enjoint à se mobiliser de nouveau pour la présente audience et à surveiller de près l’évolution de ce procès hautement politique, conformément aux lignes directrices de l’UE sur les défenseurs des droits de l’Homme ;
– exhorte l’UE à contrôler le respect des instruments du droit international et des droits de l’Homme par les autorités turques, et ce en toutes circonstances.
Le REMDH exhorte les autorités turques à :
– mettre un terme aux poursuites lancées pour des motifs politiques contre Osman İşçi et les 71 autres accusés ;
– de manière générale, mettre un terme aux actes de harcèlement judiciaire et au recours arbitraire à la loi anti-terrorisme contre des opposants pacifiques et des militants des droits de l’Homme, en particulier les militants kurdes ;
– respecter leurs obligations internationales en matière de droits de l’Homme et, en particulier, garantir le respect des droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique.
[1] Six ont été libérés le 15 février 2013 et 22 sont restés en détention jusqu’au procès.
[2] Article 6, para. 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme : « Tout accusé a droit notamment à : a) être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu’il comprend et d’une manière détaillée, de la nature et de la cause de l’accusation portée contre lui »