EuroMed Droits condamne fermement les persécutions à l’encontre d’Osman İşçi, membre du Comité exécutif d’EuroMed Droits et représentant de l’Association des droits humains en Turquie (IHD). Osman İşçi vient d’être démis de ses fonctions de professeur associé et de chercheur-doctorant à l’Université d’Ağri. Ce licenciement a été officialisé par le décret no 689, publié le samedi 29 avril 2017, qui prévoit le renvoi de 3 974 agents de la fonction publique.
Harcelé durant des années en raison de son engagement sans relâche en faveur de la promotion des droits humains, le dernier « crime » d’Osman İşçi (pour lequel il fait actuellement l’objet d’une enquête et qui lui avait déjà valu une suspension de son poste à l’Université d’Ağri, en décembre 2016) est d’avoir signé, en janvier 2016, aux côtés de plus de mille autres universitaires, la pétition pour la paix intitulée « Nous ne serons pas complices de ce crime », qui critique la politique de sécurité menée par le gouvernement dans les régions kurdes ainsi que l’imposition de couvre-feux permanents sur des villes entières[1].
Ses efforts permanents pour la défense de la liberté d’association, de la liberté d’expression et des droits des minorités ont été sanctionnés par un emprisonnement arbitraire (entre juin 2012 et mars 2013[2]), des actes de harcèlement judiciaire et, finalement, son licenciement de la fonction publique. Cette dernière mesure est à la fois radicale et disproportionnée, puisqu’elle suppose, outre la perte de son emploi, celle de ses droits sociaux, l’interdiction de travailler dans la fonction publique à l’avenir et l’annulation de son passeport.
Comme l’ont souligné la Commission de Venise et le Commissaire aux droits de l’homme dans d’autres affaires similaires[3], cette mesure est arbitraire, puisqu’elle est infondée et non justifiée individuellement (une liste de milliers de noms accompagne un décret général). La portée de cette décision est trop importante et elle touche non seulement M. İşçi, mais également sa famille, en le privant de ses revenus, de ses droits sociaux et de sa liberté de circulation.
Le cas d’Osman İşçi fait figure d’affaire emblématique parmi des centaines de défenseurs des droits humains et d’opposants pacifiques à l’autoritarisme du régime turc. En tant que président chargé des relations internationales à la fois au sein de l’IHD et de la KESK, il a voyagé sans relâche, durant des années, pour faire progresser à l’étranger la sensibilisation à la situation des droits humains en Turquie. Ce travail essentiel lui est désormais impossible, puisqu’il a arbitrairement été privé de son passeport.
EuroMed Droits est extrêmement préoccupé par la dégradation du climat en Turquie, où les droits humains sont bafoués en permanence. Nous sommes consternés par l’éloignement incessant opéré par les institutions de l’État à l’égard des principes démocratiques et de l’État de droit, en particulier avec l’adoption récente de la réforme constitutionnelle. Nous appelons les autorités turques à respecter leurs obligations internationales, la démocratie, l’État de droit et les principes universels des droits humains. La Turquie doit mettre fin à l’ensemble des mesures de harcèlement judiciaire et administratif à l’encontre de défenseurs des droits humains et de la société civile indépendante. Nous appelons l’UE, le Conseil de l’Europe et les Nations Unies à affirmer très clairement qu’ils se rangent du côté des droits humains ainsi que de la défense de la démocratie et du pluralisme. Nous espérons que les organisations internationales aborderont le cas d’Osman İşçi avec les autorités turques dans le contexte de préoccupations de plus en plus graves quant au respect des libertés fondamentales et des droits humains ainsi que du droit à un procès équitable et à des recours judiciaires.