Un an après l’entrée en vigueur de la loi n° 12-06 relative aux associations, les associations algériennes et les syndicats autonomes se sont réunis le 12 janvier 2013 à la Maison des Syndicats à Alger pour faire le bilan de la situation des libertés syndicales et associatives.
Cette rencontre initiée par les membres algériens du groupe de solidarité avec la société civile algérienne, composé par le Collectif des familles de disparus en Algérie (CFDA) – SOS Disparu(e)s, la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme (LADDH), le Syndicat national autonome des personnels de l’administration publique (SNAPAP) et le Réseau d’avocats pour la défense des droits de l’Homme (RADDH), avec le soutien de l’association Agir pour le changement et la démocratie en Algérie (ACDA), du Comité international de soutien au syndicalisme autonome algérien (CISA) et du Réseau Euro-méditerranéen des droits de l’Homme (REMDH), a rassemblé d’autres associations et syndicats autonomes du secteur privé et public algériens.
La rencontre a été l’occasion d’échanger et de discuter des problématiques rencontrées à la fois par les associations et les syndicats pour obtenir leur enregistrement et mener leurs activités. Ces difficultés sont liées à la fois à des pratiques administratives abusives comme à des dispositions très restrictives de la loi.
En effet, la loi de janvier 2012 sur les associations prévoit de lourdes peines, qui peuvent aller de trois à six mois de prison et une amende de 100 000 à 300 000 DA (de 960 à 2 900 euros environ), pour les membres et dirigeants de toute association non agréée (art. 46), faisant ainsi peser une menace constante de criminalisation sur les militants associatifs. Or, la création d’associations est soumise à une autorisation préalable des autorités qui permet un contrôle a priori de leurs objectifs, selon des dispositions légales très vagues et étendues. De plus, cette loi oblige, par un effet rétroactif, toutes les associations déjà agréées sous la loi antérieure à mettre leurs statuts en conformité avec la nouvelle législation, mettant ainsi en danger leur existence.
En ce qui concerne la loi sur l’exercice du droit syndicaln° 90-14 du 2 juin 1990,bien qu’elle prévoie un régime déclaratif, le « récépissé d’enregistrement de la déclaration de constitution » est considéré de facto comme ayant valeur d’agrément. Dans la pratique et en violation du principe du pluralisme syndical, l’enregistrement légal de nombreux syndicats autonomes est entravé par les pratiques abusives de l’administration : non délivrance du récépissé, délais injustifiés des procédures, exigence de pièces supplémentaires non précisées dans la loi. Par ailleurs, les syndicalistes font l’objet de multiples formes de harcèlement en raison de leurs activités légitimes pour la défense des droits des travailleurs ainsi que pour le respect des libertés publiques en Algérie. Parmi les plus graves, les suspensions arbitraires sans salaire touchent plusieurs militants syndicaux depuis des années.
Les organisations présentes ont montré leur solidarité avec les syndicats et les associations qui essaient de se constituer tout comme les associations concernées par la mise en conformité et ont décidé de tenir prochainement à Alger une deuxième rencontre pour renforcer leur travail de solidarité.
Enfin, les organisations signataires :
- Condamnent fermement toute forme de restriction posée à la liberté d’association et de liberté syndicale dans un contexte particulièrement préoccupant de harcèlement constant à l’encontre des défenseurs des droits de l’Homme et des militants syndicaux en Algérie.
- Expriment leur solidarité avec toutes les associations et syndicats concernés et invitent d’autres acteurs de la société civile à se mobiliser pour les soutenir.
- Appellent les autorités algériennes à cesser de bafouer le droit à la liberté d’association et à la liberté syndicale, garanti par les dispositions internationales en matière de droits de l’Homme, notamment la Déclaration des Nations Unies sur les défenseurs des droits de l’Homme et le Pacte International pour les Droits Civils et Politiques (PIDCP), ainsi que les Conventions de l’OIT, ratifiées par l’Algérie.
- Appellent les autorités algériennes à faciliter la délivrance des visas aux responsables des organisations non gouvernementales et syndicales internationales invitées par leurs partenaires algériens.