Le Réseau euro-méditerranéen des Droits de l’Homme (REMDH) et la Plateforme non gouvernementale euromed (PNGE) se réjouissent de toutes les initiatives, régionales et nationales, qui ont pour objet de renforcer le rôle des femmes dans la société, de protéger et de promouvoir les droits des femmes et la participation des femmes à la vie politique, économique et culturelle, à égalité avec les hommes.
Le REMDH et le PNGE saluent toutes les mesures en vue d’instaurer l’égalité entre les femmes et les hommes et en vue d’empêcher toute forme de discrimination vis à vis des femmes conformément aux Conclusions de l’UpM lors de la Conférence Ministérielle de Marrakech en novembre 2009.
Le REMDH et la PNGE ont participé à la coordination et à la réalisation des initiatives de la société civile, et à leurs contributions à la première et à la deuxième réunion ministérielle à Istanbul et à Marrakech, en 2006 et en 2009.
Depuis lors, le REMDH et la PNGE ont suivi attentivement la situation sur le terrain avec leurs membres, et ont salué avec satisfaction les événements survenus dans les pays du Maghreb et du Moyen Orient, qui apportaient des raisons d’espérer en matière de liberté, d’égalité et de démocratie. Ils ont aussi salué le rôle crucial joué par les femmes dans les révolutions.
En 2011-2012, le REMDH a facilité sur le plan national les discussions en profondeur et les actions en faveur des droits des femmes et de l’égalité des genres, grâce à des réunions organisées en Algérie, en Egypte, en Jordanie, au Liban, au Maroc et en Tunisie, de même qu’avec des militants syriens des droits des femmes décidés à lutter contre l’oppression.
A cet égard, le REMDH et la PNGE sont très préoccupés par la détérioration de la situation des droits des femmes dans les pays soumis à un processus de transition.
Un environnement dégradé, des pratiques patriarcales et des principes politico-religieux conservateurs, accompagnés de mesures d’austérité sur le plan économique, ont conduit à de graves violations des droits des femmes et à l’érosion de l’égalité hommes-femmes. La violence sexuelle fondée sur le « genre », par exemple, est utilisée comme une arme de guerre en Syrie, et des cas de violences sexuelles, perpétrés dans la plus totale impunité, ont été régulièrement rapportés dans plusieurs pays de la région. Les quotas parlementaires ont été abolis en Egypte, réduisant de 12 à 1,5% la représentation des femmes. Des femmes qui exerçaient leurs droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique ont été victimes de brutalités dans plusieurs pays du Sud. En Europe, de nombreuses femmes souffrent d’une plus grande précarité en raison des mesures d’austérité, associées à la montée de mouvements extrémistes, dont les politiques portent préjudice aux droits des femmes.
Le REMDH et la PNGE constatent en même temps que la situation politique dans la région reste hautement instable. Rappelons entre autres que le régime syrien est en train de bombarder et de massacrer sa propre population, que les assemblées législatives de Tunisie, d’Egypte et de Libye peinent à se constituer, que les élections parlementaires au Liban ont été reportées à 2014, qu’Israël poursuit l’expansion de ses colonies illégales, etc.
Le REMDH et la PNGE, toutefois, sont prêts à apporter leur soutien à toutes les activités qui peuvent conduire à une amélioration de la situation pour les femmes, pour les droits de l’Homme et pour la démocratie dans la région Euro-Med, et à contribuer au renforcement des activités de la société civile dans ce domaine.A cet égard, le REMDH et la PNGE regrettent qu’aucun mécanisme de mise en œuvre, de suivi et d’évaluation des Conclusions de Marrakech n’ait été établi au niveau régional, et que les Conclusions n’aient pas été traduites par des plans d’action nationaux. Nos organisations demandent la mise en place d’un tel mécanisme.
Le REMDH et la PNGE suggèrent avec fermeté que la troisième réunion interministérielle ne cherche en aucun cas à limiter les Conclusions des réunions d’Istanbul et de Marrakech.
Les ministres devraient réitérer leur engagement à promouvoir de jure et de facto l’égalité entre les hommes et les femmes, et à respecter les droits économiques, sociaux et culturels des femmes, tout comme les hommes, comme stipulé par les instruments internationaux relatifs aux droits fondamentaux, et en particulier par la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDEF).
A ce propos, le REMDH et la PNGE entendent insister sur l’importance que constituent la liberté d’association et l’indépendance de la société civile, conditions essentielles pour que les associations défendant les droits des femmes puissent exercer pleinement leur mission. Les restrictions apportées à ces libertés, y compris quant au financement des associations, sont des entraves inacceptables.
Les ministres doivent se mettre d’accord sur un Plan d’action conduisant :
a) à garantir l’égalité hommes-femmes et la non-discrimination fondée sur le « genre », comme stipulé à l’article 2 de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme et à l’article 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;
b) à combattre la violence fondée sur le « genre » en adoptant et en appliquant des lois contre la violence fondée sur le genre, y compris le harcèlement sexuel, et des lois pour la protection contre les violences domestiques ;
c) à développer et à réformer les systèmes judiciaires de manière à garantir leur indépendance et leur impartialité, et le plein accès des femmes à ces systèmes, à égalité avec les hommes ;
d) à assurer la participation des femmes à la vie politique, civile, économique et publique, inter alia en se mettant d’accord sur des quotas obligatoires comme moyens de promouvoir cette participation;
e) à abolir les articles discriminatoires qui figurent dans la loi sur le statut personnel, le code pénal et autres ;
f) à garantir le libre exercice du droit d’association et le libre accès des associations aux ressources financières.
- Le Plan d’action devrait définir des objectifs spécifiques, des activités, des calendriers, des jalons et des indicateurs, ainsi que l’attribution des responsabilités.
- Les projets menés dans ce cadre devraient inclure un soutien, notamment :
i. aux actions de la société civile visant à lever les réserves envers la CEDEF et à abolir les articles discriminatoires qui figurent dans la loi sur le statut personnel, le code pénal et autres ;
ii. à la création d’un observatoire régional sur les violences faites aux femmes, incluant un programme de réhabilitation des victimes de violences sexuelles, et une initiative régionale pour mettre fin à l’impunité en matière de violences à l’égard des femmes, dans la loi et dans la pratique ;
iii. aux programmes d’aide juridique pour les femmes, afin de garantir leur accès aux tribunaux et la non-discrimination de la part de ces derniers ;
iv. aux projets visant à promouvoir les droits économiques, sociaux et culturels des femmes, à égalité avec les hommes, en particulier le droit au travail et à l’éducation.
- De plus, les organisations indépendantes de la société civile de la région Euro-Med, y compris les organisations de défense des droits des femmes, devraient être étroitement impliquées et consultées à propos des préparatifs et des résultats de la conférence ministérielle de Paris. Des représentants de ces organisations devraient être invités à assister à la réunion ministérielle de Paris et avoir la possibilité de faire connaître leur analyse et leurs recommandations.