Les autorités égyptiennes doivent immédiatement remettre en liberté un homme poursuivi pour avoir publié des vidéos critiquant les religions, a déclaré Amnesty International, qui demande également l’abandon de toutes les charges retenues contre lui.
Alber Saber Ayad, un militant ayant participé au soulèvement de 2011, est inculpé de « diffamation de la religion ». Il est passible de six années d’emprisonnement et d’une amende de 500 livres égyptiennes (82 dollars des États-Unis). Son procès doit reprendre le 16 octobre devant un tribunal correctionnel du Caire.
« Alber Saber Ayad est un prisonnier d’opinion, détenu uniquement pour avoir exercé pacifiquement son droit à la liberté d’expression. », a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International. Il doit être remis en liberté immédiatement et sans condition.
« La critique des religions et des autres idées et convictions est une composante essentielle du droit à la liberté d’expression. Les lois – telles que les lois sur le blasphème – qui font de cette critique une infraction pénale sont contraires au libre exercice des droits humains.
« Pour offensant qu’il puisse être perçu, le fait de critiquer, d’insulter ou de tourner en dérision la religion ne porte pas atteinte à la liberté de religion des croyants. »
Alber Saber Ayad a expliqué à ses avocats qu’un policier avait incité d’autres détenus de la prison d’El Marg à l’agresser alors qu’il se trouvait en détention.
Ces détenus ont frappé Alber Saber Ayad et lui ont entaillé le cou avec une lame de rasoir. Alber Saber Ayad a ensuite été emmené dans une autre pièce, où il a été battu par 20 prisonniers. Il a ensuite été contraint de passer toute la nuit debout.
Ses avocats craignent pour sa sécurité, en prison et à l’extérieur, s’il venait à être libéré. Ils craignent également pour la sécurité de sa mère et de sa sœur, qui ont reçu des menaces et ont été contraintes de quitter leur maison, devant laquelle des groupes de personnes en colère s’étaient rassemblées.
L’avocat d’Alber Saber Ayad, Ahmed Ezzat, qui est également directeur du département juridique de l’Association pour la liberté de pensée et d’expression, a déclaré : « J’ai des craintes concernant l’attitude d’un juge religieux, qui ne fait pas la part des choses entre ses opinions personnelles et les garanties juridiques qui protègent les prévenus. »
« Les autorités égyptiennes doivent mener une enquête exhaustive, indépendante et impartiale sur le traitement infligé à Alber Saber Ayad pendant sa détention, a indiqué Hassiba Hadj Sahraoui, et déférer devant la justice les responsables présumés de ces agissements. Elles doivent aussi veiller à ce que cet homme et sa famille soient protégés contre de nouvelles persécutions ou menaces. »
Alber Saber Ayad a été arrêté à son domicile, au Caire, le 13 septembre. La veille, des groupes d’hommes s’étaient massés autour de sa maison et avaient tenté de pénétrer chez lui. Ils réclamaient sa mort, l’accusant d’hérésie, d’athéisme et de défense de l’Innocence des musulmans, un court métrage jugé offensant par beaucoup.
Sa mère avait appelé la police pour demander une protection, mais lorsque les fonctionnaires ont fini par arriver, le lendemain, ils ont arrêté Alber Saber Ayad et saisi son ordinateur personnel et des CD.
La mère d’Alber Saber Ayad, Kariman Masihah Ghali, a déclaré que le procureur en charge de l’enquête avait essayé de la mettre en difficulté en l’interrogeant sur sa foi, lui demandant si elle était chrétienne et ce qu’elle pensait du christianisme et de l’islam. Elle a répondu que, sur ces questions, Dieu serait son seul juge. Le procureur a alors ordonné que l’on porte au procès-verbal le fait qu’elle refusait de répondre aux questions.
Alber Saber Ayad a été inculpé au titre des articles 98(f), 160 et 161 du Code pénal égyptien, de « diffamation de l’islam et du christianisme », « insulte au divin » et « satire des rites religieux, des saints et des prophètes ».
« Alber Saber Ayad n’est que l’une des nombreuses personnes poursuivies pour blasphème en Égypte, a poursuivi Hassiba Hadj Sahraoui. Ces cas créent un précédent dangereux en matière de tolérance de la liberté d’expression dans le pays. »
« Il faut agir dès maintenant pour éviter de nouvelles arrestations de personnes ne faisant qu’exercer pacifiquement leur droit à la liberté d’expression. Les autorités doivent abolir les dispositions sur le blasphème présentes dans la législation égyptienne, qui sont invoquées de plus en plus fréquemment pour réprimer le droit à la liberté d’expression. »