Aujourd’hui, à l’occasion de la Journée mondiale des réfugié·es et après la conclusion de la Conférence de Bruxelles VII sur le soutien à l’avenir de la Syrie, nous appelons la communauté internationale et l’Union européenne (UE) à respecter les droits des les réfugié·es syrien·nes. Face à l’escalade des attaques et des déportations dans de nombreux pays de la région, les Syrien·nes ont toujours besoin de protection !
Depuis la mi-avril 2023, les Syrien·nes ont été soumis·es à des raids arbitraires par les autorités libanaises à travers le pays. Les autorités ont détenu et déporté arbitrairement au moins 874 personnes vers la Syrie, les remettant aux autorités syriennes à travers les points de passage frontaliers de Wadi Khaled, al Qaa et Masnaa. Parmi les personnes expulsées, certaines ont également été arrêtées par l’armée syrienne à leur retour en Syrie.
Les Syrien·nes ont été au centre d’une rhétorique anti-réfugié·es croissante lors des dernières élections en Turquie. Les déportations – ou les soi-disant « retours volontaires » – ont été des slogans clés de la campagne électorale des deux camps. Il s’agit d’une escalade après des années de limitation des droits et de projets de relocalisation forcée de centaines de milliers de Syrien·nes en Syrie. Avec la victoire d’Erdogan et son engagement à rétablir les relations avec la Syrie, la crainte d’être soumis·es à ces « retours volontaires » est de plus en plus présente.
Les discours haineux et les retours forcés sont devenus de véritables dangers dans la vie quotidienne des Syrien·nes au Liban et en Turquie, les laissant dans un état de peur constante et les forçant à adopter des stratégies d’atténuation, y compris en restant caché·es dans leurs maisons. Les réfugié·es syrien·nes sont devenu·es les boucs émissaires des crises socio-économiques et politiques de ces pays, de la hausse de l’inflation, du coût de la vie et du manque d’accès aux services de base qui affectent les secteurs les plus vulnérables de la population.
Malgré les dans toutes les régions de Syrie, dont beaucoup constituent encore des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre, les pays de l’UE font également pression en faveur du retour des Syrien·nes. Le Danemark a, par exemple, déclaré que deux autres régions de Syrie, Tartous et Lattaquié, étaient « sûres » pour les retours, en plus de Damas et du Rif Damas qui ont été déclarés « sûrs » de manière controversée en 2019. Chypre a participé à des refoulements en chaîne vers la Syrie. L’UE et les États européens financent également des programmes d’application des lois aux frontières dans la région, qui conduisent à des expulsions vers la Syrie. Ces mesures, qui augmentent les difficultés à fuir les situations dangereuses dans les pays voisins, doivent cesser et ces pays doivent être considérés comme ils le sont : non sûrs.
En raison du manque de protection et des conditions de vie difficiles dans les pays voisins, de l’absence de réinstallation ou d’autres voies légales pour demander l’asile et de la pression régionale croissante sur les retours en Syrie, de plus en plus de personnes n’ont d’autre choix que de migrer par bateau le long d’itinéraires rendus mortels par les politiques européennes de contrôle des frontières. Un exemple en est le dernier naufrage meurtrier survenu la semaine dernière au large de la Grèce – probablement le plus meurtrier en Méditerranée depuis 2015 – qui a fait des centaines de mort·es et de disparu·es, dont un nimbre important de femmes et d’enfants partis de Tobrouk, dans l’Est de la Libye, et principalement des Syrien·nes, des Égyptien·nes et des Pakistanais·ses. En 2022, les Syrien·nes étaient la quatrième nationalité à atteindre l’Italie par bateau, principalement en provenance de l’est de la Libye, mais aussi de Turquie et du Liban.
Face à ce sombre tableau, il est important que la communauté internationale et l’UE adoptent une position forte et ferme contre les retours en Syrie. Elles doivent également veiller à ce qu’aucun de leurs financements ne conduise à des violations des droits humains dans les pays voisins, ni à des déportations vers la Syrie. Malheureusement, lors de la dernière conférence de Bruxelles VII sur le soutien à l’avenir de la Syrie, le montant total des promesses a diminué par rapport aux années précédentes.
A l’occasion de la Journée mondiale des réfugié·es, EuroMed Droits appelle la communauté internationale à respecter les principes fondamentaux du droit d’asile et du non-refoulement et à faire pression sur les autorités turques et libanaises pour qu’elles cessent de commettre des violations à l’encontre des Syrien·nes. Il est urgent d’élargir l’accès à la protection, à la réinstallation et à d’autres voies légales pour atteindre la sécurité, et d’arrêter immédiatement toute tentative de déclarer des parties de la Syrie comme sûres pour les retours.
Voir le webinaire d’EuroMed Droits en amont de la Conférence de Bruxelles VII sur la Syrie : « Mort sur terre et mort en mer : pas d’alternatives pour les réfugiés syriens au Liban ».