Déclaration du REMDH à l’occasion de l’Anniversaire de la Révolution tunisienne

Le réseau Euro-méditerranéen des droits de l’Homme (REMDH) tient à féliciter tout particulièrement le peuple tunisien pour le soubresaut historique qui a secoué la nation le 14 janvier dernier. Ce soulèvement de masse, initiateur d’un printemps arabe qui s’étend à toute la région, a résolument inscrit le débat sur la démocratie et les droits de l’homme à l’ordre du jour des programmes gouvernementaux.

Le REMDH se félicite que les élections qui ont eu lieu aient été loyales, transparentes et conformes aux principes et aux pratiques d’une démocratie retrouvée. Il constate cependant que les réformes déjà entreprises, tout en ayant permis le début d’un processus de transition, n’ont pas encore abouti à rétablir un véritable Etat de droit à même de répondre aux aspirations de la plus grande partie du peuple tunisien, notamment des femmes et des jeunes.

Le REMDH reste préoccupé quant à la détérioration de la situation économique et sociale des couches les plus démunies de la population tunisienne. Il observe que c’est principalement le cas dans les régions intérieures marginalisées et encore marquées par des taux de chômage de plus en plus élevés, et où les politiques économiques imposent à une grande partie de la population locale des conditions de vie intolérables.

Le REMDH souligne l’effort louable du peuple tunisien pour accueillir les centaines de milliers de réfugiés venant de Libye tandis que l’Europe s’entête à opposer une fin de non-recevoir aux quelques dizaines de milliers de migrants tunisiens.

Il rappelle que c’est sur l’Union Européenne que pèse la responsabilité d’apporter à la Tunisie l’aide économique nécessaire pour que les espoirs de la révolution ne soient pas déçus.
Venant d’ouvrir une mission à Tunis pour accompagner tant ses organisations membres que la société civile tunisienne, le REMDH demande à l’Assemblée Constituante d’instaurer un dialogue permanent avec tous les acteurs de cette société civile bourgeonnante.

Plus spécifiquement, le REMDH demande à l’Assemblée Constituante de respecter les principes suivants :

  1. Créer les instruments nécessaires à une justice transitionnelle qui s’inspire des autres expériences internationales afin de combattre l’impunité, de réparer les préjudices moraux et matériels des victimes visant à instaurer les piliers d’une société réellement démocratique.
  2. Abolir la peine de mort.
  3. Assurer, dans le futur ordre constitutionnel, la prééminence des traités internationaux sur la législation nationale dès leur ratification par le Parlement.
  4. Assurer le respect des droits de la femme par la ratification de toutes les conventions internationales et leurs protocoles et veiller à ce que la législation nationale soit conforme à ces conventions.
  5. Ratifier la totalité des conventions en vigueur en matière de libertés civiles et politiques et de droits économiques, sociaux et culturels et mettre les lois en vigueur dans le pays en conformité.
  6. Inscrire le principe de l’indépendance du pouvoir judiciaire, y compris du Parquet, dans la constitution et définir les règles qui permettent de garantir cette indépendance ainsi que le libre exercice des droits de la défense.
  7. Conférer une valeur constitutionnelle à la liberté absolue de conscience et respecter scrupuleusement la liberté d’association et la liberté d’expression, en particulier.
  8. Définir les modalités effectives par lesquelles la responsabilité des agents de l’Etat peut être engagée devant les juridictions de droit commun.
  9. Adopter un cadre général qui permette de respecter les droits économiques, sociaux et culturels tels que définis par les conventions internationales et instaurer un système de développement équitable entre les régions.
  10. Intégrer l’enseignement aux droits de l’homme dans tous les niveaux de l’enseignement : primaire, secondaire et universitaire, en coopérant étroitement avec la société civile.
  11. Définir un statut juridique pour les réfugiés qui soit conforme aux conventions internationales dans ce domaine. Cesser de criminaliser les migrants et renégocier les accords passés avec les pays membres de l’U.E. à ce sujet.