La Syrie est désormais le pays le plus dangereux au monde pour les acteurs de l’information. Des centaines de journalistes, citoyens-journalistes et autres collaborateurs des médias ont été tués, arbitrairement arrêtés, détenus, enlevés, victimes de disparitions forcées et torturés par les différentes parties au conflit depuis le début du soulèvement il y a trois ans.
Ils ont été visés parce qu’ils couvraient la situation en Syrie, notamment des violations des droits de l’Homme.
À l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse, les ONG signataires de la présente déclaration (qui participent à la campagne « Free Syrian Voices ») exhortent toutes les parties au conflit à cesser de harceler et de persécuter les acteurs de l’information et de libérer immédiatement ceux qui sont arbitrairement détenus ou retenus en otage.
Depuis le début du soulèvement, les acteurs de l’information font systématiquement l’objet de représailles de la part des forces de sécurité du gouvernement et des milices pro-gouvernementales. Parallèlement, à compter de la mi-2012, des groupes armés non étatiques, dont des djihadistes, ont de plus en plus pris pour cibles des journalistes syriens et étrangers, tandis que des groupes paramilitaires liés au parti politique kurde PYD ont intensifié leur harcèlement à l’encontre des acteurs syriens de l’information dans la région de Hassakeh au nord-est du pays, une zone sous leur contrôle.
Plus de 150 acteurs de l’information ont été tués dans l’exercice de leurs fonctions depuis mars 2011. Neuf journalistes étrangers et plus de vingt professionnels syriens des médias sont actuellement retenus en otages ou portés disparus en Syrie, tandis qu’environ quarante journalistes et citoyens-journalistes syriens sont toujours détenus par le gouvernement.
Où sont Ali Mahmoud Othman et Mohamed Nour al-Shemali, des citoyens-journalistes arrêtés par les autorités syriennes respectivement en mars et décembre 2012 ? Où est Obeida Batal, reporter enlevé par les membres d’un groupe armé en juillet 2013 ? Le tribunal anti-terrorisme condamnera-t-il le journaliste Mazen Darwish et ses deux collègues, Hussein Ghrer et Hani al-Zaitani pour avoir « fait la promotion d’activités terroristes » ?
En vertu du droit humanitaire international, les journalistes sont protégés en tant que civils. La résolution 1738 du Conseil de sécurité de l’ONU sur la sécurité des journalistes en situation de conflit, adoptée en décembre 2006, condamne les attaques menées à l’encontre des journalistes dans les conflits armés. La résolution de l’Assemblée générale de l’ONU sur la sécurité des journalistes et la question de l’impunité, adoptée en novembre 2013, « condamne sans équivoque toutes les attaques et violences contre les journalistes et le personnel des médias, comme la torture, les exécutions extrajudiciaires, les disparitions forcées et les détentions arbitraires ». Elle exhorte également les « États membres à faire tout leur possible pour prévenir la violence contre les journalistes et le personnel des médias […] et à traduire les coupables de tels crimes en justice ».
Malgré ces résolutions internationales, les journalistes continuent d’être confrontés à de graves dangers en Syrie, où ils payent le prix fort pour faire leur travail. Leurs droits continuent d’être bafoués en toute impunité. Au moins sept journalistes et neuf professionnels syriens des médias ont été tués depuis janvier 2014.
Signataires :
Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH)
Front Line Defenders
Reporters sans frontières (RSF)
Réseau euro-méditerranéen des droits de l’Homme