Feu vert à la Commission européenne pour réduire le financement des États membres « illibéraux » ! Le 16 février 2022, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a rejeté les actions en justice intentées par la Hongrie et la Pologne contre le mécanisme de conditionnalité qui subordonne l’obtention de financements européens au respect de l’État de droit.
Après avoir déclenché l’article 7 du traité sur l’UE (TUE) contre la Pologne et la Hongrie, respectivement en 2017 et 2018, l’UE a désormais une arme puissante entre ses mains pour contrer les attaques contre l’État de droit, l’indépendance du pouvoir judiciaire et la liberté d’expression au sein de l’UE. L’article 7 du TUE prévoit une procédure contre un État membre en cas de (risque de) violation grave des valeurs de l’Union, bien que son déclenchement n’ait pas porté beaucoup de fruits puisque l’unanimité est requise, et qu’il ait même été utilisé par les deux pays pour alimenter leurs discours anti-UE.
L’espoir réside désormais dans la volonté de la Commission européenne d’agir rapidement pour déclencher le mécanisme en réduisant, suspendant ou même interdisant le financement étant donné les « déficiences généralisées » en Pologne et en Hongrie. Dans les minutes qui ont suivi l’arrêt de la CJUE, les deux pays ont invoqué un parti pris politique et mis en doute la crédibilité de la Cour. Ursula von der Leyen, la Présidente de la Commission européenne, a déclaré que la Commission adopterait dans les semaines à venir des « lignes directrices apportant davantage de clarté » sur la manière d’appliquer le mécanisme en pratique.
L’arrêt de la CJUE marque le dernier round d’une bataille juridique de longue date visant à faire respecter les normes démocratiques dans les États membres de l’UE. Cependant, comme l’a souligné précédemment EuroMed Droits, un tel mécanisme devrait également être mis en place pour traiter avec les pays non-membres de l’UE qui portent gravement atteinte à l’État de droit chez eux. Les ONG de défense des droits humains appellent depuis des lustres à une plus grande cohérence entre les politiques extérieures et intérieures de l’UE, en ayant à l’esprit la capacité de l’UE à conditionner son soutien extérieur au respect des droits humains, tout en constatant que les « membres du club » restaient préservés. Ne pas appliquer un mécanisme de conditionnalité similaire en dehors de ses frontières placerait l’UE dans la situation paradoxale de « ne pas pratiquer à l’extérieur ce qu’elle prêche à l’intérieur ».