L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), le Réseau Euro-méditerranéen des droits de l’Homme (REMDH), le Collectif des familles de disparus en Algérie (CFDA), la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme (LADDH), le Syndicat national autonome des personnels de l’administration publique (SNAPAP), le Réseau d’avocats pour la défense des droits de l’Homme (RADDH) et Agir pour le changement et la démocratie en Algérie(ACDA) dénoncent vivement le refus d’enregistrement de l’Association nationale de lutte contre la corruption (ANLC) et appellent les autorités algériennes à cesser d’entraver la liberté d’association.
Le 29 octobre 2012, l’Association nationale de lutte contre la corruption (ANLC) a reçu une correspondance du ministère de l’Intérieur, datée du 9 octobre 2012, l’informant du refus de délivrance du récépissé d’enregistrement ayant valeur d’agrément de l’association, sans motivation de ce refus et alors que la loi prévoit qu’une décision est nécessaire (article 10). Par ailleurs, la lettre ne donne aucune précision quant aux raisons de ce refus ni aux dispositions qui auraient été enfreintes. En effet, la lettre ne fait référence qu’au « non-respect de la Loi sur les associations » (Loi n°12-06 du 12 janvier 2012) et empêche ainsi l’ANLC d’identifier et de rectifier toutes irrégularités subsistant dans son dossier.
L’ANLC a pour but de sensibiliser et éduquer aux problématiques de la corruption, un domaine dans lequel même la loi algérienne encourage, en principe, « la participation de la société civile à la prévention et à la lutte contre la corruption » (Loi n°06-01 du 20 février 2006, art. 15). A la suite de son assemblée constitutive, tenue le 7 juillet 2012, l’ANLC avait déposé un dossier complet de demande d’agrément le 9 août auprès du bureau des associations du ministère de l’Intérieur, conformément à la nouvelle loi sur les associations, qui a désormais instauré un régime d’autorisation préalable. Contrairement aux dispositions de la même loi (art. 8), le ministère n’a pas délivré le récépissé de dépôt du dossier, empêchant de facto tout recours contre cette décision devant la justice.
Cette nouvelle loi est d’autant plus préoccupante qu’elle prévoit de lourdes peines, qui peuvent aller de trois à six mois de prison et/ou une amende de 100 000 à 300 000 DA (de 960 à 2 900 euros environ), pour les membres et dirigeants de toute association non agréée (art. 46) en faisant ainsi peser une menace constante de criminalisation sur les défenseurs des droits de l’Homme en Algérie. D’autres associations, constituées sous l’ancien régime, sont elles aussi tenues de se conformer à la loi par le dépôt de nouveaux statuts conformes à la loi, mettant ainsi en danger toutes les associations créées sous la loi intérieure.
Nos organisations :
- Condamnent fermement ce refus arbitraire d’enregistrement qui s’inscrit dans un contexte particulièrement préoccupant de harcèlement constant à l’encontre des défenseurs des droits de l’Homme en Algérie.
- Appellent les autorités algériennes à cesser de bafouer le droit à la liberté d’association, garanti par les dispositions internationales en matière de droits de l’Homme, notamment la Déclaration des Nations Unies sur les défenseurs des droits de l’Homme et le Pacte International pour les Droits Civils et Politiques (PIDCP).