Après une mission à Huelva en Espagne, EuroMed Droits a lancé une campagne, avec le mouvement CNCD-11.11.11, sur l’urgence à respecter les droits fondamentaux des travailleur.se.s migrant.e.s.
Manque de transparence des contrats, exploitation salariale et conditions de vie indignes. A Huelva, en Andalousie, près de 100.000 saisonnier.ère.s se pressent pour cueillir les fruits rouges qui viendront achalander les supermarchés européens. Ces hommes et ces femmes qualifié.e.s « d’essentiel.le.s » pendant la pandémie peinent toujours à faire reconnaître leurs droits.
EuroMed Droits a pu le constater lors de sa mission en avril dernier : avec ou sans papiers, ces personnes migrantes s’agrègent dans des camps de fortune, sans eau potable ni soins, et restent à la merci d’employeurs souvent peu scrupuleux. D’autres, des femmes marocaines pour l’essentiel, viennent pour la récolte dans le cadre de contrats saisonniers. Bien que légaux, ceux-ci n’en font pas moins l’objet d’entorses. « C’est toujours le même problème, ces femmes signent un contrat au Maroc par le biais de l’agence pour l’emploi local, sans vraiment qu’il leur soit expliqué quoi que ce soit. Une fois en Espagne, les patrons leur en font signer un autre pas du tout aux mêmes conditions, qui ne respecte pas la Convention signée entre les deux pays », expliquent Ana Pinto et Najat Bassit, fondatrices de Jornaleras de Huelva en Lucha.
Ces systèmes d’exploitation sont d’un autre âge et appellent à une réflexion globale. Pas seulement à Huelva mais aussi dans toute l’Europe où ces zones de non-droit sont nombreuses et où les pénuries de bras et le recours à la main d’œuvre étrangère font craindre une aggravation des dérives.
L’UE doit se saisir de cette occasion pour que soit adoptée au plus vite une loi européenne sur le devoir de vigilance (sur le modèle de la loi demandée par l’ONG belge CNCD 11-11-11) afin d’obliger les entreprises à prévenir les atteintes aux droits humains chez leurs fournisseurs. Les élu.e.s doivent également plancher sur des solutions durables, comme les voies légales évoquées par la Commission européenne le 27 avril dernier en vue de faire venir ces personnes de manière sécurisée. Bien qu’elle soit intéressante, cette piste doit toutefois faire l’objet de garde-fous : la hausse de l’immigration légale ne doit en aucun cas faire l’objet d’un marchandage, ni être conditionnée par une augmentation des retours ou un renforcement des contrôles frontaliers.