Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes

DECLARATION : Emprisonnées et oubliées, les femmes en détention dans les zones de conflit

En cette Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes et à l’occasion du 15e anniversaire de la résolution 1325 du Conseil de sécurité de l’ONU sur les femmes, la paix et la sécurité, EuroMed Droits exprime ses vives inquiétudes suscitées par la détérioration de la situation des femmes en détention dans les zones touchées par le conflit. Nous sommes particulièrement préoccupés par les violations généralisées du droit international humanitaire dont sont victimes les femmes palestiniennes et syriennes en détention.

Depuis Septembre 2015, EuroMed Droits a été témoin de presque deux fois plus d’arrestations et de détentions israéliennes de femmes palestiniennes en raison de leur participation au récent soulèvement. [1] Les chiffres montrent que la majorité des femmes sont battues et insultées au cours de leur arrestation et détention.[2] Les femmes palestiniennes sont principalement détenues dans des prisons situées à l’extérieur des territoires palestiniens occupés (TPO). En plus d’être illégale selon le droit international, cette pratique empêche les détenues d’avoir accès à leur avocat et de rencontrer leur famille. En effet, il est souvent interdit aux familles de visiter des détenues pour des « raisons de sécurité ». Les femmes détenues sont également soumises à diverses formes de maltraitance et de torture psychologique lors de leur arrestation et détention; menaces, fouilles corporelles dégradantes et harcèlement sexuel sont des pratiques courantes. Le plus souvent, les femmes sont détenues dans des conditions de détention inappropriées, sans tenir compte de leurs besoins spécifiques, y compris l’accès à des soins médicaux spécifiques.

En Syrie, les femmes sont de plus en plus exposées à la détention arbitraire étant donné qu’elles sont utilisées comme atout de négociation dans les échanges d’otages lors des négociations avec les différentes parties au conflit. Les groupes armés extrémistes, en particulier ceux de « l’Etat islamique », ont conquis de grandes parties du territoire syrien où ils imposent un ordre social qui compromet gravement les droits fondamentaux des femmes syriennes. D’autre part, les autorités syriennes nient systématiquement la détention de femmes dans des centres secrets à travers le pays. Cela va contre les témoignages corroborés indiquant que des centaines de femmes sont toujours emprisonnées dans des conditions effroyables dans ces centres de détention secrets où torture et violences sexuelles sont des pratiques courantes.

En particulier, EuroMed Droits tient à souligner le sort de plus de 400 femmes et 20 enfants, actuellement détenus dans la section des femmes à la Prison Centrale de Damas (Adra). Régulièrement soumis à des abus physiques et à l’isolement cellulaire, ils sont également exposés à diverses formes de mauvais traitements, y compris la privation de nourriture appropriée, des vêtements, d’accès aux médicaments de base, de chauffage et d’électricité. Les avocats et les membres de la famille ont un accès limité aux détenus alors qu’on empêche les organismes internationaux de procéder à la surveillance effective des conditions de détention de ces prisonniers. En outre, et comme la prison est située sur la ligne de front actuelle entre les forces gouvernementales et les groupes armés de l’opposition, la vie des femmes détenues se trouve gravement menacée. Ces femmes pourraient être utilisées comme «boucliers humains». Il va sans dire que leurs familles craignent les attaques contre les prisons ainsi que le danger de prendre les femmes en otage.

À la lumière de ce qui précède, nous exhortons la communauté internationale à:

  • Tenir les auteurs de crimes internationaux contre les femmes palestiniennes et syriennes responsables en conformité avec la résolution 1325 et le droit international humanitaire
  • Appeler à l’accès immédiat des mécanismes de surveillance internationaux aux lieux de détention en Syrie et la Palestine ainsi que l’accès de l’aide humanitaire et médicale aux femmes détenues
  • Appeler la Syrie à l’arrêt immédiat de toute maltraitance à l’égard de l’ensemble des femmes détenues dans tout centre de détention et toute prison à travers le pays
  • Se pencher d’urgence sur la situation des prisonnières palestiniennes et leurs conditions de détention dans le dialogue politique avec Israël
[1] De Septembre à Octobre 2015, le nombre de femmes palestiniennes détenues par Israël a augmenté de 25 à 41. Voir http://www.addameer.org/statistics
[2] Voir le rapport publié par Miftah en 2015