Le Collectif des Familles de Disparus en Algérie (CFDA), la Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l’Homme (LADDH), le Réseau Euro-Méditerranéen des Droits de l’Homme (REMDH), le Syndicat National Autonome du Personnel de l’Administration Publique (SNAPAP), le Réseau des Avocats pour la Défense des Droits de l’Homme (RADDH) et l’Association pour le Changement et la Démocratie en Algérie (ACDA) apprennent avec inquiétude la condamnation du défenseur des droits de l’Homme Yacine Zaïd à 6 mois de prison avec sursis et 10 000 dinars d’amende, mais se félicitent que la mobilisation des militants associatifs et syndicaux ait conduit sa libération.
Lundi 8 octobre, le défenseur des droits de l’Homme Yacine Zaïd, est comparu devant le tribunal de première instance de Ouargla (Sud de l’Algérie) tandis qu’une centaine de syndicalistes et militants des droits de l’Homme venus de différentes régions manifestaient dehors leur solidarité, s’étant vu refuser l’accès à la salle d’audience par un important dispositif policier.
Yacine Zaïd est accusé d’outrage et agression contre agent de la force publique, selon les articles 144 et 148 du code pénal. C’est pourtant lui qui a été agressé par des agents de police lors de son arrestation sur un bus de ligne le 1er octobre dernier entre Ourgla et Hassi Messaoud. Selon un témoin présent lors de l’interrogatoire, après le contrôle des documents d’identité, Yacine Zaïd avait été interrogé pendant deux heures environ et avait reçu des coups sévères au visage et dans la nuque de la part de trois policiers. Il a ensuite été enlevé par deux personnes habillées en civil, et détenu au secret jusqu’à sa comparution devant le procureur de Ouargla le lendemain, qui l’a maintenu en détention jusqu’à son procès hier.
Une plainte avait été déposée le 7 octobre par les avocats de Yacine Zaïd pour coups, blessure et agression de la part des agents de police.
Lors de l’audience du 8 octobre, le juge a initialement interdit aux deux témoins de l’agression d’assister à l’audience, et ils n’ont pas été entendus par le procureur. Après de vives protestations, l’équipe d’avocats de la défense a néanmoins pu les appeler à la barre comme témoins à décharge.
Nos organisations déplorent que ces témoignages clés n’aient pas été pris en compte et dénoncent vivement la condamnation de Yacine Zaïd, connu pour son engagement sans faille en faveur des droits de l’Homme et des libertés syndicales en Algérie. Ses avocats ont indiqué avoir l’intention de faire appel du verdict.
Nos organisations appellent les autorités algériennes à :
– mettre fin au harcèlement judiciaire dont Yacine Zaïd est victime, qui ne vise qu’à sanctionner son rôle de défenseur de droits de l’Homme, ainsi que celui de l’ensemble des syndicalistes et défenseurs des droits de l’Homme en Algérie.
– garantir la liberté d’expression, d’association et de manifestation de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme en Algérie qui revendiquent leurs droits de manière pacifique, en conformité avec la Constitution algérienne et avec le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ratifié par l’Algérie.
Nos organisations appellent par ailleurs les autorités de l’Union Européenne à mettre activement en œuvre les Lignes Directrices sur les Défenseurs, en particulier en dépêchant des observateurs aux procès intentés contre des défenseurs des droits de l’Homme, et en engageant un dialogue soutenu avec les autorités algériennes afin de faire cesser le harcèlement judiciaire et policier subit par de nombreux défenseurs.
Yacine Zaïd, syndicaliste, membre du SNAPAP représentant l’Algérie au sein de l’Union Internationale des Travailleurs de l’Alimentaire, et président de la section de Laghouat de la LADDH est un défenseur des droits de l’Homme connu et respecté en Algérie. A cause de ses activités, Yacine Zaïd connaît un harcèlement judiciaire important. Le 25 septembre dernier, il est comparu devant la section de simple police du Tribunal de Bab el Oued avec trois autres militants et défenseurs de droits de l’Homme pour « incitation à attroupement non armé » (art. 100 du Code pénal). Ils risquent jusqu’à un an d’emprisonnement et 5 000 DA d’amende (environ 50 Euros) pour avoir participé à un sit-in pacifique, le 26 avril 2012, devant le Tribunal de Sidi M’hamed pour dénoncer le harcèlement judiciaire dont est victime Abdelkader Kherba, membre du Comité national pour la défense des droits des chômeurs (CNDDC) et de la LADDH. Lors de l’audience du 25 septembre, l’affaire a été renvoyée au parquet. A ce jour, l’affaire n’a toujours pas été classée.