La Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH), le Réseau euro-méditerranéen des droits de l’Homme (REMDH) et la Ligue tunisienne de défense des droits de l’Homme (LTDH) dénoncent avec la plus grande vigueur la campagne de diffamation menée à l’encontre de l’Instance supérieure pour l’indépendance des élections (ISIE) et de son président, Kamel Jendoubi.
Alors que l’Assemblée nationale constituante (ANC) examine le projet de loi établissant une nouvelle ISIE dans la perspective de l’organisation et la tenue des élections présidentielles et législatives annoncées pour 2013, nos organisations expriment leur profonde préoccupation quant aux procédures judiciaires intentées à l’encontre de l’ISIE et aux virulentes campagnes de diffamation menées depuis plusieurs semaines à l’encontre de son président. Ces manoeuvres laissent craindre une tentative de contrôler la nouvelle instance électorale indépendante qui doit être mise en place en Tunisie, et de porter préjudice à son efficacité.
Les organisations signataires ont été informées de l’ouverture d’une enquête par un juge d’instruction pour faits de malversations imputés à l’ISIE. Cette instruction ouverte à l’initiative du ministère public fait suite à une plainte déposée par un avocat mandaté par le Chef du contentieux de l’Etat contre l’ISIE. Tout cela au moment où les présidents de la République, de l’Assemblée constituante et le chef du Gouvernement déclaraient qu’ils s’étaient mis d’accord pour soutenir la candidature de Kamel Jendoubi à la présidence de la nouvelle ISIE.
Les informations diffusées à la fois par des représentants du gouvernement et des médias tunisiens font référence à des fuites relatives à des observations confidentielles de la Cour des comptes demandant à l’ISIE de justifier certaines dépenses. Ces demandes de justificatifs par la Cour des Comptes ont été interprétées par certains comme constituant une preuve de malversations dont se serait rendue coupable l’ISIE. A ce jour, le rapport de la Cour des comptes portant sur les travaux de l’ISIE, pendant l’exercice qui a précédé et directement suivi la tenue des élections des membres de l’ANC le 23 octobre 2012, n’a pas été finalisé et n’a dès lors, pas été rendu public. En outre, des sources concordantes affirment que l’ISIE aurait fourni à la Cour des comptes les informations complémentaires demandées.
Les organisations signataires demandent aux autorités tunisiennes à ce qu’un terme soit mis aux procédures qui selon les informations disponibles, sont infondées et ce tant que la Cour des comptes n’aura pas remis son rapport et fait la lumière sur cette affaire. Nos organisations appellent en outre les autorités tunisiennes à garantir un débat serein sur le projet de loi établissant une nouvelle ISIE dans la perspective de l’organisation et la tenue des élections présidentielles et législatives de 2013.
Contexte
Nos organisations rappellent que l’ISIE sous la responsabilité de son président Kamel Jendoubi est l’instance qui a permis le déroulement des premières élections pluralistes, transparentes et libres en Tunisie, qui ont non seulement mené à la mise en place d’une Assemblée nationale constituante démocratiquement élue mais également du premier pouvoir légitime en Tunisie. Les attaques diffamatoires menées par des membres du gouvernement, de certains partis politiques et de certains médias ciblent une instance dont les membres ont travaillé sans relâche pour que ce scrutin historique, unanimement reconnu comme libre et transparent, puisse se tenir.
M. Jendoubi a porté inlassablement les aspirations de la société tunisienne à la justice sociale et à des réformes démocratiques auprès de l’opinion publique et des instances internationales. Empêché par les autorités tunisiennes de fouler le sol de sa terre natale à partir de 1994 du fait de ses activités de défense des droits humains, M. Jendoubi est rentré en Tunisie en janvier 2011.
Kamel Jendoubi a été sous le régime de Ben Ali la cible de menaces et d’attaques de toutes sortes de la part des autorités tunisiennes, et notamment de violentes campagnes de diffamation dans les organes de presse contrôlés par le parti alors au pouvoir.
Kamel Jendoubi est président d’honneur du REMDH qu’il a présidé de 2003 à 2011. Il a également été membre fondateur de la Fédération des Tunisiens pour une Citoyenneté des deux Rives (FTCR) et du comité pour le respect des libertés et des droits de l’Homme en Tunisie (CRLDHT), membre du conseil exécutif de l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT), président de l’Institut du Caire pour les Etudes des droits de l’Homme (CIHRS) et membre du bureau de la Fondation Euro-méditerranéenne de soutien aux défenseurs des droits de l’Homme (FEMDH).