Le double jeu égyptien sur Gaza : soutien humanitaire et répression

Le gouvernement égyptien a reçu les félicitations de plusieurs leaders mondiaux, dont Angela Merkel et Joe Biden, pour son rôle dans la médiation qui a mené à l’accord de cessez-le-feu qui a mis fin à l’offensive israélienne de 11 jours sur Gaza en mai dernier. La rhétorique humanitaire de l’Égypte à cette occasion est surprenante étant donné que le Président al-Sisi avait renforcé le blocus sur Gaza lors de l’offensive militaire israélienne de 2014. 

A la suite du cessez-le-feu, al-Sisi a annoncé un soutien humanitaire et 500 millions de dollars pour aider à la reconstruction. Le 16 mai, les autorités égyptiennes ont ouvert le point de passage de Rafah – l’accès terrestre entre l’Egypte et Gaza – pour permettre l’accès de matériel médical dans le nord du Sinaï où ils ont envoyé un convoi médical pour soigner les Palestinien.ne.s blessé.e.s. Parmi le personnel médical, le Dr Hossam Eddin Shaaban a été disparu de force pendant deux semaines après avoir critiqué l’absence de toute manifestation en soutien au peuple palestinien, ce qui est interdit selon la loi anti-manifestation (Protest Law). 

Le loup déguisé en agneau 

En réalité, les autorités égyptiennes ont ouvert et fermé le point de passage de Rafah, de manière ponctuelle, depuis l’accord de 2005 sur la liberté de mouvement et le droit d’accèset ce, bien qu’Israël garde un contrôle important sur ce point d’entrée. L’Égypte est complice d’Israël dans le blocage, depuis 14 ans, de la bande de Gaza en échange de maigres bénéfices, tels que le transfert d’aide humanitaire ou la participation aux négociations de cessez-le-feu. En ce sens, l’Égypte contrevient également à ses obligations découlant de la Quatrième Convention de Genève (entre autres, l’interdiction d’imposer des peines collectives et de refuser le passage aux équipes médicales) qu’Israël viole en imposant une peine collective aux Palestinien.ne.s de Gaza. 

L’Égypte a violé le droit international à plusieurs reprises en faisant usage d’une force excessive et létale, notamment en tirant sur des pêcheurs palestiniens qui étaient soi-disant entrés dans les eaux territoriales égyptiennes. Le 25 septembre 2020, deux pêcheurs ont été tués, et un autre a été blessé et détenu par l’armée égyptienne pendant cinq mois. 

De manière regrettable, les autorités égyptiennes continuent de museler la liberté d’expression des Égyptien.ne.s qui soutiennent les droits des Palestinien.ne.s. Omar Morsi et Nour al Hoda Zaki ont été arrêtés pour avoir brandi un drapeau palestinien sur la place Tahrir alors que des manifestations pro-palestiniennes étaient organisées à travers le monde. De la même manière, l’activiste politique égypto-palestinien, Ramy Shaathleader du mouvement Boycott, Désinvestissement et Sanctions en Égypte est détenu de manière arbitraire depuis près de deux ans pour avoir défendu les droits des Palestinien.ne.s. 

L’image d’une Égypte en tant qu’acteur clé de la sécurité et de la stabilité dans la région nourrit la communication du régime. Et pourtant, reconnaître les efforts diplomatiques égyptiens dans l’obtention d’un cessez-le-feu et dans la fourniture d’aide humanitaire à Gaza ne devrait pas faire oublier les violations des droits humains perpétrées par le gouvernement égyptien.