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Grèce et Chypre : du berceau de la démocratie à la criminalisation de la solidarité

Les attaques contre les ONG travaillant sur les questions de migration et d’asile se sont multipliées, tant en Grèce qu’à Chypre. 

Entre février et septembre 2020, une série d’amendements et deux décisions ministérielles, liées à la procédure d’enregistrement et de certification des ONG dans les domaines de l’asile, de la migration et de l’inclusion sociale, ont été adoptées en Grèce. En violation directe de la liberté d’association et des règles régissant la protection des données personnelles, les employé.e.s de ces ONG doivent désormais soumettre leur CV et une copie de leur casier judiciaire au Ministère grec en charge de la migration et de l’asile. Ces décisions ont été condamnées par le Conseil d’experts du Conseil de l’Europe, qui a estimé que ces exigences étaient «incompatibles avec la liberté d’association». 

 En mars 2020, plusieurs organisations ont dénoncé ces attaques et la stigmatisation de la solidarité. En juillet 2020, un centre de traitement du COVID-19 de Médecins Sans Frontières sur Lesbos a dû fermer ses portes suite à l’imposition d’une amende relative à des règlements urbanistiquesEn septembre 2020, le gouvernement grec a poursuivi en justice 33 personnes employé.e.s dans des ONG pour avoir «formé et rejoinune organisation criminelle, espionnage et violation de secrets d’Etat». 

La criminalisation de la solidarité va de pair avec un renforcement de la criminalisation contre les migrant.e.s. et les réfugié.e.s et la systématisation des pratiques illégales de refoulement aux frontières terrestres et maritimes. Sous le prétexte du COVID-19, le gouvernement grec a arbitrairement imposé des périodes de confinement plus longues et plus strictes pour les migrant.e.s et les réfugié.e.s détenu.e.s dans des camps ou des centres d’accueil. Cette décision a davantage restreint les droits des demandeurs.ses d’asile et des migrant.e.s, leurs libertés personnelles ainsi que leur liberté de mouvement, tout en violant le droit de leurs enfants à l’éducation. 

 A Chypre, la situation est également alarmante. Le gouvernement a criminalisé et calomnié, de manière répétée, les acteurs locaux de la société civile. Le Ministre de l’intérieur a empêché des organisations de la société civile de mener leur travail ; dans certains cas, il a même décidé de les faire fermer. Le 14 décembre 2020, son ministère a publié une liste d’ONG à radier du Registre des associations et des fondations parce qu’elles ne répondaient pas à certaines exigences. KISA, une organisation membre d’EuroMedDroits, se trouvait parmi celles-ciaccusée de n’avoir pas tenu une assemblée générale et de n’avoir pas soumis l’audit de ses comptes. KISA fait également face à des accusations de coopération avec des organisations terroristes religieuses collaborant avec la Turquie, de corruption, de blanchiment dargent et de contribuer aux «changement identitaire démographique et culturel de Chypre par la Turquie»Son accès au camp de détention des migrant.e.s de Pournara a été suspendu. L’appel de KISA contre la décision de radiation du Registre sera revu le 3 mars 2021 par une cour administrative. 

Criminaliser des organisations parce qu’elles apportent une aide fondamentale et un soutien légal que les Etats membres eux-mêmes n’apportent pas aux migrant.e.s et aux réfugié.e.s laissent des centaines de personnes sans protection ou soutien crucial en termes d’accès aux procédures de demandes d’asile, de garanties juridiques ou de besoins élémentaires.