Rechercher

07/03/2023 – 04/04/2023

  • Le 24 mars, le navire de sauvetage Louise Michel a enregistré 180 personnes en détresse lors de multiples opérations SAR lorsque plusieurs bateaux ont chaviré en Méditerranée centrale. Selon l’équipage, un navire des garde-côtes italiens était également présent au cours d’une de ses opérations, mais a ignoré les appels à l’aide répétés pendant environ 37 minutes avant de finalement soutenir la mission. Après le premier sauvetage, le MRCC italien a fait pression sur l’équipage pour qu’il ne s’engage pas dans un autre sauvetage et a désigné Trapani comme port de débarquement. Après le troisième sauvetage, le navire a ensuite été affecté à Lampedusa comme port de sécurité, plus proche, pour les 180 survivant·es à bord. Une fois débarqué, le navire a été détenu en raison de la violation dunouveau décret italien qui interdit aux navires SAR d’effectuer plusieurs sauvetages au cours d’une même mission.
  • Le 12 mars, 30 personnes sont mortes en Méditerranée centrale après que les autorités italiennes, maltaises et libyennes ne soient pas intervenues malgré les nombreuses alertes de détresse envoyées par AlarmPhone et Sea-Watch. Lorsque le bateau a chaviré, seules 17 personnes ont été secourues vivantes par un navire marchand. Le 11 mars, les garde-côtes italiens ont sauvé un bateau en détresse dans la zone SAR italienne, qui avait quitté la Libye transportant plus de 500 personnes. L’opération de recherche et de sauvetage a été effectuée plus de 24 heures après la première alerte de détresse envoyée par Alarm Phone. Le 10 mars, un autre bateau transportant environ 80 personnes a été sauvé par les autorités italiennes deux jours après que les premières alertes de détresse ont été envoyées par Alarm Phone à Malte et en Italie. Le 9 mars, plus d’un millier de migrant·es arrivé·es sur l’île de Lampedusa en Afrique du Nord. Les migrant·es – apparemment originaires de Syrie, du Yémen et de divers pays africains – avaient commencé leur voyage depuis la ville côtière tunisienne de Sfax. Un des nombreux bateaux partant de Sfax a chaviré en route vers l’Italie causant la mort de 14 personnes. Le 27 mars, EuroMed Droits a publié une interview avec la BBC sur les derniers naufrages et sur l’impact sur les flux migratoires de la répression actuelle des migrant·es par les autorités tunisiennes.
  • Le 14 mars, la médiatrice des enfants et des adolescent·es Carla Galatti adéclaré qu’un nombre croissant de tuteurs bénévoles est nécessaire pour aider les mineur·es non accompagné·es. Depuis le début de l’année, près de 2 000 migrant·es et réfugié·es mineur·es sont arrivé·es dans le pays sans leur famille, soit près de trois fois plus qu’au début de 2022. Garlatti a exhorté les citoyens à se porter volontaires tuteurs légaux pour les mineur·es. Elle a également déclaré que la tutelle « doit être davantage promue, en particulier dans les régions d’arrivée ».
  • Le 13 mars, le gouvernement italien a accusé le groupe de mercenaires russes Wagner d’être à l’origine de l’afflux de bateaux de migrant·es tentant de traverser la Méditerranée centrale, dans le cadre de la stratégie de représailles de Moscou contre les pays soutenant l’Ukraine. Le ministre italien de la Défense, Guido Crosetto, a appelé les alliés de l’OTAN à aider l’Italie à faire face à l’augmentation des arrivées de migrant·es. Des remarques similaires ont été faites par le ministre italien des Affaires étrangères Antonio Tajani qui, lors d’une visite en Israël, a parlé de de nombreuses personnes migrantes venant de zones « contrôlées par le groupe Wagner ». L’UE n’a pas tenu compte des accusations italiennes. La vice-présidente de la Commission européenne, Margaritis Schinas, a minimisé les alertes italiennes, indiquant que « la cause de la migration est que les gens fuient la guerre et la persécution ou cherchent une vie meilleure » et exclut tout lien direct entre l’augmentation des arrivées en Italie début 2023 et la présence du groupe paramilitaire russe en Libye.
  • Le 9 mars, le gouvernement italien s’est réuni à Cutro pour discuter d’un nouveau décret sur la migration, à la suite du naufrage meurtrier au large de la Calabre le 26 février, qui a tué plus de 80 personnes. Le décret, approuvé par la Chambre des députés italienne, est maintenant sous surveillance au Sénat, et contient des dispositions urgentes sur l’entrée légale des travailleur·ses étranger·es et la lutte contre l’immigration irrégulière. Plus précisément, le décret prévoit des sanctions plus sévères pour celles et ceux qui promeuvent, organisent, financent ou effectuent le transport d’étranger·es, ainsi que l’introduction d’un nouveau délit pour « mort ou blessure à la suite de délits dans le domaine de l’immigration clandestine », passible d’une peine pouvant aller jusqu’à trente ans d’emprisonnement. Deuxièmement, le décret limite les circonstances dans lesquelles le régime national de protection des migrant·es peut être reconnu, en excluant les migrant·es dont le statut est accordé en raison de liens familiaux et sociaux et celles et ceux qui sont en Italie depuis de nombreuses années et qui se sont pleinement intégré·es. Enfin, des réglementations sont introduites pour renforcer le processus d’expulsion des migrant·es en situation irrégulière en accélérant les procédures. Quant à l’entrée des travailleur·ses étranger·es, le décret stipule que la loi fixant les quotas de travailleur·ses migrant·es et octroyant les permis de séjour à des fins de travail doit être planifiée sur une période de trois ans, plutôt que d’être fixée chaque année.
  • Le décret a été critiqué par plusieurs experts et défenseur·ses des droits humains qui ont accusé le gouvernement italien de se concentrer sur la criminalisation croissante de la contrebande pour dissimuler sa responsabilité dans le naufrage et les morts qui en ont résulté. Le décret a également été qualifié d’inadapté pour résoudre le problème complexe et structurel de la gouvernance des migrations. Le 11 mars, plus de 5000 personnes se sont rassemblées à Cutro pour protester contre le gouvernement italien, sa position sur la migration et ses récentes tentatives d’entraver les ONG de recherche et de sauvetage.
  • En attendant, les investigations pour faire la lumière sur le naufrage du 26 février sont toujours en cours. Le 6 mars, le parquet de Rome a ouvert un dossier après une plainte déposée par des parlementaires Verts et Alliance de gauche. À l’heure actuelle, les enquêteurs procèdent sans aucune hypothèse de crime et envisagent de transmettre le dossier au parquet de Crotone, qui a déjà ouvert une enquête sur l’affaire, pour les questions de compétence territoriale. On ne sait toujours pas pourquoi les garde-côtes italiens ne sont pas intervenus pour vérifier l’état du navire et mener une opération SAR avant que la situation ne se détériore. Les autorités italiennes nient toute responsabilité dans le naufrage, accusant Frontex de ne pas avoir envoyé d’alertes de détresse aux garde-côtes italiens. Frontex, en revanche, affirme avoir signalé la position, la route, la vitesse du navire ainsi que des informations complémentaires sur les mauvaises conditions de mer aux autorités italiennes dès que le bateau a été repéré par son avion. En ce qui concerne l’alerte de détresse, Frontex a précisé que, selon son règlement, l’agence de l’UE ne peut pas dire si un bateau est en détresse ou non et que, selon le droit international, qualifier un événement de recherche et de sauvetage relève de la responsabilité des autorités nationales. Il aurait été la décision de l’Italie d’envoyer deux patrouilleurs de la Guardia di Finanza pour intercepter le navire après la communication de Frontex, déclenchant une opération de maintien de l’ordre au lieu d’une opération de recherche et de sauvetage. Le 8 mars, la commissaire européenne aux affaires intérieures Ylva Johansson afermement défendu la réponse de Frontex en déclarant que l’agence a tout fait pour éviter la tragédie.
  • Un article publié sur le journal italien la Repubblica du 13 mars a tenté de faire la lumière sur l’événement en décrivant les règles d’engagement entre les garde-côtes italiens et la Guardia di Finanza italienne, réglementant au cas par cas qui doit intervenir lorsqu’un bateau de migran·es est signalé. Selon une directive de 2005, qui a été rétablie par l’ancien ministre de l’Intérieur Matteo Salvini en 2019, les garde-côtes sont censés surveiller les bateaux et intervenir uniquement dans les situations de danger grave et immédiat pour la vie des migrant·es à bord. Selon le journal, cela expliquerait que, lorsque les autorités italiennes ont reçu la communication de Frontex, la situation n’aurait pas été considérée comme une urgence suffisamment grave pour nécessiter une opération de recherche et de sauvetage.