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Priorité au contrôle des frontières au mépris des vies humaines : violations des droits des migrants et des réfugiés en mer

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Alors que le Conseil européen s’apprête à adopter des lignes directrices stratégiques visant à appuyer la planification législative et opérationnelle dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice, le Réseau euro-méditerranéen des Droits de l’Homme (REMDH) tient à rappeler que l’approche sécuritaire jusqu’ici appliquée ne porte pas seulement atteinte aux droits des migrants et des réfugiés, mais elle met aussi leur vie en danger.

Les lignes directrices stratégiques qui seront adoptées par les Chefs d’Etat européens les 26 et 27 juin ont pour objectif de façonner le programme post-Stockholm de l’Union européenne. Seront aussi examinées lors de cette séance les recommandations présentées par la task-force pour la Méditerranée, chargée de « sauver des vies » suite à la mort tragique de 366 migrants au large des côtes de Lampedusa, le 3 octobre 2013.

A la veille de l’adoption du nouveau programme post-Stockholm de l’UE, le REMDH exhorte le Conseil européen et les Etats membres de l’UE à faire en sorte que les prochaines politiques migratoires de l’UE et leur cadre juridique respectent pleinement les droits des migrants et des réfugiés, sur son territoire et au-delà de ses frontières. Un tel résultat ne peut être obtenu que grâce à un engagement sincère envers les droits de l’Homme, à la promotion d’une véritable solidarité entre les pays de l’UE, à une attention plus soutenue envers le renforcement des systèmes de protection dans les Etats membres ainsi que dans les pays extérieurs à l’UE, au développement des voies d’entrée légales au sein de l’UE et à la mise en place de mécanismes de protection permettant de suivre l’impact et les conséquences des politiques migratoires de l’UE sur les droits de l’Homme.

Dans sa dernière note, Le contrôle des frontières, une priorité sur la vie humaine, le REMDH explique comment et pourquoi les cadres juridiques et les politiques actuelles mettent en danger la vie des migrants et des réfugiés en mer et conduisent à la violation de leurs droits. La véritable raison pour la mort des migrants et des réfugiés en mer n’est pas le manque de surveillance ou de capacité à secourir les embarcations en détresse, c’est avant tout la réticence fondamentale des Etats européens à assumer leurs responsabilités à l’égard des personnes secourues. Le phénomène est exacerbé par un manque évident de solidarité au sein de l’UE, dont le meilleur exemple est le règlement de Dublin, qui attribue au premier pays d’arrivée la charge d’évaluer le droit d’asile, ce qui impose aux pays frontaliers une pression injustifiée, alors qu’ils sont déjà confrontés à une situation difficile.

Dans ce contexte, les mesures proposées par la task-force pour la Méditerranée pour contrer les décès en mer ne font que revisiter l’approche sécuritaire définie par la politique migratoire de l’UE au cours des dix dernières années. L’accent est mis, de façon disproportionnée, sur la coopération avec les pays tiers, sur le renforcement des contrôles aux frontières par le biais de Frontex et d’EUROSUR, et sur l’augmentation des retours volontaires pour les migrants clandestins. Alors que le but revendiqué est de « sauver des vies », les politiques mises en place permettent en fait de limiter l’accès au territoire de l’UE et, dans certains cas, des pays voisins. Sous leur forme la plus extrême, ces politiques autorisent à repousser en mer les réfugiés ou d’autres personnes en attente de protection vers des pays tiers, en violation du principe de non-refoulement.

«  Il est extrêmement préoccupant qu’un nombre de plus en plus grand d’acteurs de l’UE appelle désormais à la construction de centres de rétention et le traitement de demandes d’asile dans des pays éloignés tels que la Libye, sous le fallacieux prétexte de dissuader les réfugiés de s’embarquer et de risquer leur vie », déclare Michel Tubiana, Président du REMDH. « Il ne suffit pas que les pays de l’UE définissent des politiques qui se contentent de sauver des vies. Ils ont aussi l’obligation de s’assurer que les droits des personnes ‘sauvées’ soient pleinement protégés. »